The Sloks – s/t 7″

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Ce modeste mais nĂ©anmoins classieux 7″ Ă  la couverture sĂ©rigraphiĂ©e constitue le vĂ©ritable acte de naissance discographique du trio turbogarage de Turin. Les quatre morceaux gravĂ©s sur ce bout de vinyle Ă©taient connus, puisqu’ils s’écoutaient dĂ©jĂ  sur leur bandcamp, mais on les dĂ©couvre ici dans une nouvelle version. Son de guitare resserrĂ© et qui a pris un dose supplĂ©mentaire de fuzz, si c’était possible, et la voix d’Ivy Claudy parfois un peu davantage prise dans le mix, mais qui garde toute sa saveur acide et fĂ©roce.

Pour le reste, on retrouve les riffs de guitare Ă©chevelĂ©s, la batterie mĂ©tronomique et la voix totalement dĂ©viante qui composent la formule du trio et ses compositions rock’n roll minimalistes hautement inflammables. Tank of gasoline, avec une allumette la fĂȘte est plus folle. Use me et sa rage froide droit dans les yeux. Into the mud, on se vautre dedans avec un plaisir de gorets. Et mon petit prĂ©fĂ©rĂ©, Close the door et son riff dru qui va finir par l’enfoncer, la porte. Un rock’n roll speedĂ©, jouant la carte de la rĂ©pĂ©tition, le cerveau en position off, jusqu’à la transe, la combustion spontanĂ©e.

Soit Ă  peu prĂšs l’effet que produit en concert ce groupe dĂ©vastateur et salvateur.

Nevraska : l’art du bruit

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Ça pourra paraĂźtre sĂ»rement un peu niais de commencer comme ça, mais peu importe : faire l’interview de Nevraska est un vrai bonheur. Parce que les deux musiciens sont aussi accessibles et passionnĂ©s que leur musique urgente et sincĂšre le laisse supposer, d’abord. Ensuite, parce qu’eux-mĂȘmes parlent du bonheur de cette nouvelle aventure sonique. Leur concert au Brin de Zinc Ă  Barberaz a Ă©tĂ© l’occasion de les questionner sur la gĂ©nĂšse de leur premier album, Grave Romance.

Sur votre site vous Ă©voquez un peu votre façon d’écrire et vous dĂźtes que vous avez jetĂ© autant que construit. Comment ça marche l’écriture chez vous ?

Pascal : Quand on dit « jeter », c’est tout le parcours qu’on a eu, dĂ©jĂ . Avant d’arriver Ă  Nevraska, j’ai montĂ© trois ou quatre groupes. J’ai essayĂ© des styles, j’ai essayĂ© des mecs. Quand on dit « jeter », c’est que ça marchait pas. On n’avait pas le feeling. Il y a des choses qu’on a gardĂ©es en nous pour Nevraska et il y a des choses qu’on a jetĂ©es parce qu’on a vu que ça marchait pas. C’est ça qu’on appelle « jeter ».

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Pascal, Nevraska (© Elsa Dumoulin)

Et le centre du truc pour Nevraska, c’est que le feeling est lĂ . Donc je propose un riff, je le fait Ă©couter Ă  Cyril, tout de suite on tapote dessus, on essaye. Si ça nous convient tout de suite, on approfondit. Si on ressent pas quelque chose de suffisant, on essaye de le faire Ă©voluer. Et on a quelques riffs, on avait senti un truc mais finalement c’était pas suffisant.

Et Ă  chaque fois que j’amĂšne un truc, il faut que tous les deux on ressente exactement la mĂȘme chose. Si on ressent ça, c’est qu’on se fait mutuellement confiance et que ça va ĂȘtre bien. Et on garde.

Il y a un morceau qui m’a particuliĂšrement frappĂ© sur votre disque, c’est « Kollapse ». Trois petites notes que vous faĂźtes Ă©voluer, avec un roulement de caisse claire assez Ă©pique Ă  un moment. Comment s’est Ă©crit ce morceau-lĂ  ?

P : Moi j’avais en tĂȘte un truc un peu Ă  la Botch, voire Ă  la Breach, pour ce morceau. Peut-ĂȘtre que ça n’a rien Ă  voir mais c’était cet environnement dissonnant… D’ailleurs, entre nous on l’a appelĂ© « Breach » pendant longtemps…

Cyril : C’est pour ça qu’on l’a appelĂ© « Kollapse » avec l’orthographe suĂ©doise !

P : Et donc Ă  chaque fois, c’est la mĂȘme chose : on improvise sur le riff, on essaye de voir si on ressent la mĂȘme chose et puis on agrĂ©mente . C’est pour ça que tout de suite derriĂšre, il y a un espĂšce de blast. On s’est dit « ça va ĂȘtre drĂŽle, ça ». Et c’est marrant parce que ce morceau divise les gens : c’est carrĂ©ment pour ou carrĂ©ment contre. Certains le trouvent monstrueux et d’autres disent que c’est celui qu’ils aiment le moins.
C : Il y a le petit riff qui groove. Serge Moratel nous avait dit : ça fait trÚs Chicago.

C : C’est d’ailleurs le seul morceau qu’on a jouĂ© sans clic. Sur celui-lĂ , le mĂ©tronome empĂȘchait le feeling de sortir.

P : Avec un peu de bouteille, on se dit que c’est bien d’essayer d’étirer les riffs pour bien qu’on soit dedans. C’est le travail qu’on essaye de faire : d’étirer


C : D’exploiter au maximum


P : Ouais, d’exploiter un autre rythme, une autre note qui va avec le riff ou qui va en amener d’autres. Et puis le but c’est de bosser à la sensation, au ressenti, donc effectivement on fait tourner. On essaye de voir ce qu’on ressent.

C : Le plus simple, pour un musicien, c’est d’enchaĂźner des trucs. Le plus dur c’est d’exploiter un riff et d’en faire quelque chose. La plupart des grands morceaux sont basĂ©s sur un riff et puis un bridge et puis voilĂ . En tous cas, exploiter un riff et arriver Ă  en faire quelque chose qui se dĂ©veloppe, c’est balĂšze. C’est certainement plus complexe que de fonctionner avec des mĂ©thodes et des chapitres, des plans.

P : Il y a des groupes qui le font trĂšs bien. Mais moi, mon gros problĂšme depuis toujours – enfin, lĂ , ça va mieux – c’est ça : j’ai un riff, j’ai un riff, j’ai un riff… Dans tous les groupes, c’était ça. On a plein de riffs. Putain, on en a trop ! Mais on a quand mĂȘme une sensation de pas assez ! Et lĂ  tu te dis : on a mille riffs et on a une sensation de pas assez ! C’est juste fou !

C : Et ça, en fait, c’est le fait de rentrer dans un concept musical qui t’empĂȘche de faire autrement. Ah non, on peut pas faire groover un truc parce que ça va pas faire mĂ©tal !

P : Et nous comme on n’en a rien Ă  foutre ben, du coup, on s’en fout ! Et mĂȘme ça nous fait rire de mettre le blast alors qu’on partait sur truc hyper lent et ensuite sur un truc groovy pour filles qu’apparemment certains n’aiment pas.

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Cyril (© Elsa Dumoulin)

Et donc, j’imagine que ça ne vous arrive jamais d’avoir une idĂ©e et de vous dire « Ah non, ça, c’est pas pour Nevraska ».

P : Surtout pas ! Nevraska, c’est quoi ? On le dit depuis le dĂ©but, Nevraska, c’est rien, on n’en a rien Ă  foutre, on fait ce qu’on veut. Comme c’est rien, faisons tout !

C : Il peut y avoir des problĂšmes d’approche. On peut se dire « Ah, ça, on connaĂźt pas. On a jamais exploitĂ© ce genre de choses. » Mais le but, c’est de se libĂ©rer.

P : Et ce qui nous fait plaisir, c’est qu’en live, comme en album maintenant, on a ce mĂȘme retour les gens nous disent « On se fait jamais chier, zique aprĂšs zique. Il y a tout le temps un petit truc diffĂ©rent. » J’ai eu deux ou trois retours personnels oĂč les mecs me disent « GĂ©nĂ©ralement, sur un album on zappe deux ou trois morceaux et surtout sur un album de potes oĂč c’est plus petit niveau, et lĂ , on Ă©coute de A Ă  Z. » On est contents. C’est ça qu’on veut pas perdre. Demain, on peut faire un truc hyper lent ou bourrin. Un groupe, c’est l’empreinte que tu donnes. Ça serait complĂštement fou de se dire on fait tel ou tel style, surtout Ă  notre niveau…

Votre album s’intitule Grave Romance, d’oĂč vient ce nom ? Il Ă©voque un univers un peu folk


C : Grave romance, c’est des histoires anglaises sur des thĂšmes presque macabres, je dirais. Plusieurs personnes sensibles nous ont dit qu’on avait l’impression d’écouter une histoire avec des passages qu’on pourrait interprĂ©ter comme une rencontre, un accident, etc. Il n’y a pas vraiment de chant qui explique tout ça donc c’est juste de la musique, une image. Mais c’est pas dans un sens sucrĂ© ou hyper positif : on fait pas de la musique populaire ou trĂšs gaie. Mise Ă  part « Kollapse » peut-ĂȘtre un peu ! (Rires)

P : Moi dans « Grave romance », j’aime le mineur/majeur. C’est beau, puis c’est triste, puis c’est beau et triste et puis tu sais plus. J’aime tous ces groupes qui font ça. Genre Microfilm. J’ai adorĂ© ce groupe parce qu’ils ont des riffs et des thĂšmes et des harmonies
 T’as envie de pleurer et puis t’as envie de rire Ă  la fois. Je trouve ça trĂšs beau.

Je pense que c’est peut-ĂȘtre un truc de notre gĂ©nĂ©ration, qui s’est beaucoup dĂ©veloppĂ© avec l’émo, le hardcore Ă  tendance Ă©motionnelle


C : Ouais, Neurosis.

P : Et puis le screamo. Moi c’est pour ça que j’ai beaucoup aimĂ© le screamo Ă  une Ă©poque. Il y avait des trucs trĂšs beaux et ça pouvait ĂȘtre bourrin en mĂȘme temps.

Pour en revenir au groupe, comment le fait d’ĂȘtre deux influence votre musique, voire votre façon d’ĂȘtre sur scĂšne ?

P : C’est deux choses diffĂ©rentes. Niveau musique, ĂȘtre deux, ça simplifie. Et encore, on n’est que deux mais parfois on passe des heures Ă  dire non…, mais si…, mais je crois que…, mais non…, etc.

Et puis, ĂȘtre deux ça vous laisse plus d’espace Ă  chacun, aussi


C : C’est peut-ĂȘtre plus simple en termes de dĂ©cision mais par contre ça demande beaucoup plus de travail. Moi sur mon instrument je dĂ©veloppe plus qu’avant, j’ai les samples Ă  gĂ©rer, un peu de chant – chose que je n’avais jamais faite auparavant. Ça demande du boulot et niveau mise-en-place, concentration, c’est pas tout de suite que tu deviens Ă  l’aise.

P : C’était pas le but qu’on commence Ă  deux et c’est vrai que c’est Ă  double tranchant : il y a un espace qui se libĂšre mais faut le complĂ©ter. Avec un jeu plus fourni, des pĂ©dales, des samples. Donc ça se rĂ©flĂ©chit encore plus.

C : T’as plus ton guitariste pour te dire « Je vais te faire ces petits sons, lĂ  ». C’est Ă  toi de les trouver


P : Ou, tout simplement, t’as plus ton guitariste qui te fait un truc et tu te dis « Ah ben voilĂ , ça sonne »

Plusieurs chroniques que j’ai pu lire parlent du dialogue trĂšs dynamique entre vos deux instruments…

P : Ça se fait naturellement…
C : Enfin, ça s’est pas fait en une semaine, hein ! Il a fallu presque un an avant qu’on ait cette complicitĂ©. On avait jamais jouĂ© ensemble avant, mine de rien ! On commence Ă  avoir un bagage mais Il a quand mĂȘme fallu un temps d’adaptation…
P : Et en plus on est parti sur une base trĂšs simple, saine : on s’amuse et on verra bien ce que ça donne. Et, petit Ă  petit, on s’est dit « Ah, c’est plutĂŽt pas mal ! »

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(© Elsa Dumoulin)

Et par rapport à votre son, quelle idées vous aviez ?

P : Je te pose une question : est-ce que, en Ă©coutant l’album, tu ressens les lives ?


 Ouais je retrouve quelque chose


On a travaillĂ© Ă  mort avec Serge Morattel mais l’idĂ©e c’était vraiment de retranscrire ce qu’on fait en live. AmĂ©liorĂ© bien sĂ»r, mais je voulais pas qu’il y ait un diffĂ©rence oĂč ça fait waouh et en live : bof. Au dĂ©but , « Tomoe Gozen » et d’autres, je les faisais sans disto, en vrai basse-batterie, et puis aprĂšs il faut enrichir alors le naturel revient au galop donc tu te dis on va y mettre un coup de pĂȘche, un coup de disto…
Et j’ai fait Ă©voluer mes pĂ©dales en mĂȘme temps que le groupe Ă©voluait. J’ai jamais Ă©tĂ© trop pĂ©dale en tant que bassistes et puis lĂ  je me suis Ă©clatĂ©. Je rĂ©flĂ©chissais. Je me suis dit je vais peut-ĂȘtre faire deux rĂ©seaux, gratte et basse, pour amener plus
 Donc le son s’est fait comme ça, en mĂȘme temps que l’évolution du groupe, pendant un an et demi


C : ArrivĂ©s chez Serge Moratel, ça a Ă©tĂ© un sale cirque. Ils ont revu pleins de choses…

P : MĂȘme si tu veux ressortir la mĂȘme chose en rĂ©pĂšte et en live, ça sortira diffĂ©rent au final. Du coup, il faut « tricher » pour s’efforcer d’avoir le mĂȘme rendu en studio. Ça n’a pas Ă©tĂ© facile.
Sur certains trucs ça sortait pas du tout comme je voulais, il y avait une espĂšce de latence dĂ©gueu, trĂšs diffĂ©rente du jeu en live. Ça le faisait pas, comment on peut faire ?

C : L’ingĂ©-son doit rentrer dans son monde Ă  lui, se mettre Ă  sa place, avec son matĂ©riel. C’est pas Ă©vident, je voyais bien qu’on lui posait problĂšme parfois. C’est parfois trĂšs long pour faire un son.

Et lĂ , vous n’ĂȘtes pas restĂ©s longtemps, en plus ?

C : Non, on était pris par le temps ; on est restés une semaine en studio. On a du prolonger de 3 jours, en coupant la poire en deux avec Serge Moratel.
P : On avait 8 jours et on avait commencĂ© par faire des re-amp de basse. On s’est rendu compte que ce n’est pas ce qu’il fallait.

On s’est mis d’accord, et j’y suis retournĂ© pour tout redoubler et lĂ  on a pris tout un week-end Ă  se demander ce qu’on voulait pour chaque partie de chaque morceau, quel ressenti on veut lui donner, et lĂ  ça a pris tournure, d’autant qu’on mettait encore d’autres effets lors des prises. On a retravaillĂ© chaque passage.

Il a été disponible et le travail était intense

C : Il Ă©tait content, je pense, mais il s’est un peu tirĂ© les cheveux. C’était une dĂ©couverte un peu pour chacun et le temps prĂ©vu initialement n’était pas suffisant pour ce projet.
P : On avait fait « NĂ©bula » et « LirĂŒ » dans un Ă©tat de grĂące, enregistrĂ© en 20 minutes et mixĂ© en une journĂ©e. Mais ce rythme-lĂ , c’était impossible Ă  tenir sur un album.
C : Serge Moratel a dit qu’avec le recul, il Ă©tait impressionnĂ©. Il a postĂ© sur facebook spontanĂ©ment pour prĂ©senter Nevraska, ce qui n’est pas son habitude.
P : C’est un amoureux de la musique, il sort pas un truc qu’il n’aime pas de son studio.

C : On a trop bien fait d’aller le voir !

Est-ce qu’il y a un titre dont vous ĂȘtes particuliĂšrement fiers sur cet album ? Ou que vous aimez particuliĂšrement ?

P : Fier, non, mais pour moi, celui qui qui rassemble tout, c’est « Reason to claim ».
C : J’adore « Runaway », il est un peu Ă  part… Il est simple et il a quelque chose de pĂ©tillant et qui passe bien.

Sur « Alkaline », il y a un plan qui fait presque electro, avec la batterie linéaire, ça ressort carrément.

P : Ben là, pareil, on s’est dit : on aime bien le dub, on va se faire une ambiance dub à la Nevraska !
P : Et lui, il (Serge Moratel NDLR) a agrĂ©mentĂ© avec un ampli qui apportait un grĂ©sillement en arriĂšre-plan derriĂšre la disto, il nous a dit « Bon les gars, vous faĂźtes quand mĂȘme du noise, hein ! On laisse ! ».

Par rapport à la pochette du disque, est-ce que l’aspect visuel est important pour vous ?

P : On avait trĂšs peu de temps, c’est ma copine qui a fait le premier jet et je l’ai terminĂ©. On Ă©tait Ă©tonnĂ©s par la cĂŽtĂ© vĂ©gĂ©tal.
C : On sort du stĂ©rĂ©otype du groupe math-rock – quoique la tendance au vĂ©gĂ©tal gagne un peu mais c’est pas fait exprĂšs. J’ai trouvĂ© sympa la coupure qui suit les lignes du logo, juste ce qu’il faut. On s’est un peu pris la tĂȘte pour la couleur…
P : Faite rapidement, mais je la trouve magnĂ©tique et c’est le plus important.
C : Une pochette qui donne pas envie laisse prĂ©sager la mĂȘme chose pour la musique.
P : Une pochette exprime un ressenti du groupe, comme la zique en fait. Enfin, je crois….

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(© Elsa Dumoulin)

Quelles sont les esthĂ©tiques auxquelles vous ĂȘtes sensibles ? Quelles sont les pochettes ou les groupes dont l’esthĂ©tique vous ont marquĂ©s.

C : Les pochettes de Converge, par exemple, trĂšs expressives. Il y a vraiment un travail artistique, c’est pensĂ©… AprĂšs, parfois les pochettes toutes bĂȘtes font de l’effet aussi.
P : Moi, je serais plus attiré par le cÎté minimaliste.
C : Je pense qu’il faut essayer de s’amuser avec tout, faire des pochettes qui n’ont rien à voir avec les anciennes ou les prochaines. C’est bien le changement, je change constamment les breaks de batterie. Je m’ennuie, sinon.

Qu’est-ce qu’on peut attendre de vous à l’avenir, en termes de projets et en termes musicaux ?

P : On va dĂ©fendre l’album, dĂ©jĂ , on a dĂ©jĂ  quelques dates pour le dĂ©but d’annĂ©e sur Walk the line. Et d’autres salles cool Ă  venir…
C : On espĂšre qu’avec l’album il va se passer quelque chose… On est preneur de pouvoir tourner plus…
P : Clairement, on manque de temps pour dĂ©marcher autant qu’on le voudrait…

P : Musicalement, ben, on a plein d’idĂ©es…
C : On cherche un peu Ă  sortir de l’album…
P : LĂ , on a fait un morceau qui n’a rien Ă  voir…. On va la faire ce soir, histoire de voir un peu ce que ça donne. Elle est un peu spĂ©ciale. Pour moi, c’est limite du Pink-Floyd math-rock (Rires) !

C’est toi qui t’occupe des samples, Cyril ?

C : J’essaie de m’adapter techniquement, et de m’y mettre un peu pour crĂ©er, mais Pascal est plus avancĂ© que moi.
P : Cyril a amenĂ© l’idĂ©e des chants bulgares dans « Nemesis »…
C : J’ai mis des heures Ă  faire ce qu’un mec qui sait ferait en deux minutes mais bon c’est comme ça que tu apprends…
P : Le morceau initial avait un riff jazz au milieu et l’ensemble ne marchait pas, ça a fini par donner au final deux des titres de l’album « Dux Bellorum » et « Nemesis ».
P : Au final elles ont chacun leur identité.
C : « Dux Bellorum », C’est une entrĂ©e en scĂšne. C’est comme un souffle qui avance, progressivement.

Comme vous ĂȘtes un groupe trĂšs actuel, j’avais envie de vous demander trois groupes ou musiciens qui reprĂ©sentent pour vous le rock d’aujourd’hui et que vous nous conseilleriez ?

P : Moi je trouve ça trĂšs bien de faire des choses comme ça , j’aimerais qu’il y ait bien plus de groupes qui partagent leurs goĂ»ts. Comme tu nous avais dit « rock » et « actuel »…
C : Ah merde, y’avait « rock » et « actuel » ?
P : …et ben :
- Electric electric Sad Cities Handclappers, c’est ce qui m’a fait chavirer dans le Math-rock
- Mouse on the Keys : un groupe japonais qui te font du math-rock piano batterie. Je m’en suis jamais remis…
- Lite : Phantasia
AprĂšs, il y en a plein d’autres : Doppler…
C : Moins math rock : Candiria Beyond reasonnable doubt – le batteur a Ă©tĂ© une grosse influence. Converge…. Eighties Matchbox B-line Disaster : le premier album est Ă©norme. Simple, direct mais il fallait le faire. Et puis, si je vis vieux, je pense que « It’s me god », de Breach, restera toujours prĂšs de moi…

« A shape of noise to come » (A Shape – Le Poulpe, 13 janv.)

a shape nb1.JPGUne bonne fĂ©e noise semble avoir touchĂ©e la programmation du Poulpe en ce dĂ©but de mois de janvier, aprĂšs la soirĂ©e terrible de vendredi dernier. Et quoi qu’il en soit, tant qu’ils en donnent, on prend, on prend !

Un seul groupe Ă  l’affiche de l’auberge sonique de Reignier ce soir-lĂ  : A Shape. Un groupe qui n’a pas encore sorti de disque et oĂč on retrouve Sasha, la chanteuse d’Heliogabale.

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Les morceaux de A Shape ont été mixés par Lee Ranaldo, le guitariste de Sonic Youth et il semble que la référence aux New-Yorkais soit assez incontournable, tant les entrelacs de guitare cristalline et la voix féminine se détachant sur la masse sonore y font parfois penser.

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Mais un Sonic Youth en morceaux, avec le verre concassĂ© et les angles coupants dedans. A Shape, c’est les mĂ©lodies sucrĂ©s et les coups de butoir, le miel et le gravier mĂ©langĂ©s dans la bouche.

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Les morceaux souvent assez longs du groupe dĂ©ploient leurs spirales de rĂ©sonnances, d’Ă©chos et de distortions. Des ambiances de fiĂšvre et de confusion. Mais la confusion, c’est le sexe.

La chanteuse a un peu des airs de Kim Gordon française. Elle semble parfois s’adresser Ă  un interlocuteur invisible pour dĂ©rouler ses histoires ou ses imprĂ©cations fiĂ©vreuses. D’une maniĂšre trĂšs proche de celle d’Ivy Claudy, la voix de The Sloks, ce groupe turinois qui avait fait forte impression lors de leur passage Ă  Annecy et dont vous devriez entrendre reparler prochainement dans ces pages.

Bon sang, mais quelle chance de voir de tels groupes dans une salle si intime ! Ô Ă©mo-noise kid, fan des 90s, oĂč Ă©tais-tu ce soir-lĂ  ? Et dire qu’en septembre Le Poulpe va ouvrir une salle de 400 places… On a eu droit Ă  un CD de l’album pour quelques euros. Pour les autres, il y a toujours le bandcamp oĂč on peut Ă©couter trois des morceaux du groupe. En attendant un disque qui finira sĂ»rement par venir.

« Torrents d’amour soniques » (Black Mont-Blanc, Noyades, Satan – Le Poulpe, 6 janv.)

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Trois groupes au Poulpe, c’Ă©tait presque un mini festival !

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Et trois groupes bruyants, en plus. C’est Black Mont-Blanc qui a ouvert le bal, bien qu’on Ă©tait un peu trop serrĂ©s – mais c’est qu’il y a du monde – pour danser. Black Mont-Blanc, c’est un nouveau groupe – c’Ă©tait leur premier concert – oĂč, en plus du guitariste chanteur, l’on retrouve deux membres de We are the incredible noise, si je ne me trompe pas. Incredible noise qui rĂ©pĂšte Ă©galement au Poulpe. Parce que le Poulpe, en plus d’organiser de bons concerts, sont aussi une pĂ©piniĂšre de groupes. S’il-vous-plaĂźt.

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Trio, donc. C’est beau les trios. C’est pur. Surtout quand ça envoie du noise-rock furibard, tendu. Breaks nerveux, cassures, voix qui s’Ă©trangle en arriĂšre-fond du torrent de bruit.

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Quelques morceaux plus planants aussi, oĂč le groupe se laisse aller Ă  des arpĂšges mĂ©ditatifs. Belle entrĂ©e en matiĂšre, pas de doute, et qui donne grandement envie d’en voir et d’en Ă©couter plus. VoilĂ  un groupe qui devrait aller taquiner les Worst in me et autres Tuco de l’autre cĂŽtĂ© de la frontiĂšre.

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Noyades

La salle s’est remplie encore un peu plus, si c’Ă©tait possible, pour Noyades. Ce trio lyonnais vient de sortir son premier album et enchaine les weekends de concerts dans une tournĂ©e en pointillĂ©s.

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La musique de Noyades est une sorte de croisement entre noise-rock (grosse basse) et musique psyché (cavalcades effrénées, portes de la perception traversées depuis belle lurette).

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Le tourbillonnement sonique entĂȘtant fait son effet Ă©tourdissant, mais mes oreilles formatĂ©es au post-hardcore ne peuvent pas s’empĂȘcher d’ĂȘtre gĂ©nĂ©es par le cĂŽtĂ© trĂšs linĂ©aire de cette musique, qui me semble dĂ©suet. J’essaye mais j’arrive pas vraiment Ă  m’y faire.

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Satan viennent tout droit de Grenoble et ont assĂ©nĂ© un set totalement furieux et totalement jouissif. Rafales de blasts incessantes. Grind-punk bloquĂ© sur l’ultra-violence.

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Le chanteur de ce magnifique groupe portait un tee-shirt de Danzig et, Ă  bien y rĂ©flĂ©chir, leur « musique » a un petit cĂŽtĂ© rock ‘n roll, un petit cĂŽtĂ© horror-punk. Mais petit.

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All hail Satan !

Pour les adorateurs du malin et les amateurs de bruit vomi que nous sommes, par contre, c’Ă©tait 100% de bonheur.