« PoĂȘme de bruit » (Korto, L’Effondras – Brin d’Zinc, 31 mars)

l_effondras-117.jpg

Retour au Brin d’Zinc pour un concert organisĂ© par John et SalomĂ©*, une toute nouvelle asso (dans laquelle on retrouve des membres du groupe Don Glow) dĂ©diĂ©e aux musiques psychĂ©s sous toutes leurs formes.

Korto ne sont pas inconnus au bataillon, c’est un groupe qui tourne trĂšs rĂ©guliĂšrement et a justement sorti un 7″ avec les susnommĂ©s Don Glow.

Paire basse-batterie ronflante, vĂ©loce, qui fait un boulot terrible tandis que la guitare vient y poser ses motifs planants ou stridents. Le psychĂ©-rock de Korto, c’est une pincĂ©e de froideur kraut hallucinĂ©e, un peu d’huile stoner pour le moteur, sans oublier un brin de pop dans la voix Ă©thĂ©rĂ©e qui surfe sur l’ensemble avec nonchalance, et rappelle certains groupes noisy-pop anglais des annĂ©es 90.

Vous assemblez tout ça, vous y mettez (note la touche stylistique locale) un coup de clĂ© Ă  molette bien serrĂ© et vous avez un joli bolide rĂ©tro-futuriste prĂȘt Ă  vous emmener vers les Ă©toiles.

l_effondras-82.jpg

De L’Effondras, on ne connaissait que peu de choses. Une rĂ©putation de groupe Ă  part, quelques chroniques et l’Ă©coute d’un disque, impressionnant, oĂč tout semble pensĂ©, travaillĂ©, mĂ»ri. La hĂąte d’aller Ă  la rencontre physique de leur musique le disputait Ă  la curiositĂ© Ă  l’approche de leur concert au Brin de zinc, sur la route d’une tournĂ©e pour la sortie de leur deuxiĂšme album, « Les Flavescences ».

l_effondras-88-cca99

DĂšs les premiers accords, l’atmosphĂšre est tendue, habitĂ©e. Le trio est arc-boutĂ© sur ses instruments, respire la concentration. On les sent dĂ©terminĂ©s Ă  donner quelque chose de fort, au service de leur musique Ă  la fois grandiose et Ă©purĂ©e. Notes esseulĂ©es, esquisse de mĂ©lodie, sans cesse reprise, sans cesse amplifiĂ©e et ornĂ©e.

l_effondras-49.jpg


La prĂ©sence de l’Effondras pouvait Ă©tonner dans une soirĂ©e dont la couleur annoncĂ©e Ă©tait plutĂŽt la musique psychĂ©dĂ©lique. A priori, avec L’Effondras, on est Ă  mille lieux de la musique psychĂ©. Loin des dĂ©luges de fuzz, des ritournelles garage estampillĂ©e sixties ou des solos tonitruants Ă  la wah-wah. L’Effondras, c’est tout le contraire : le dĂ©pouillement, la sobriĂ©tĂ©, tant au niveau du son que des mĂ©lodies. C’est l’anti-psychĂ©. Ou alors : psychĂ©dĂ©lique dans un tout autre sens, un sens austĂšre et beau. Moins portĂ© sur les paradis artificiels et plus sur une contemplation violente, sur l’obscuritĂ© et le mystĂšre.

l_effondras-37

En fait, ces types donnent l’impression de jouer du rock avec une rigueur d’instrumentistes classiques et leur musique elle-mĂȘme explose les cadres du rock. Elle en garde pourtant toute la violence – des rĂ©fĂ©rences comme Sonic Youth ou les pointures du post-rock sont rĂ©guliĂšrement Ă©voquĂ©es – mais les atmosphĂšres puissamment Ă©motionnelles qu’elle convoque sont d’une intensitĂ©, d’une ferveur qu’on ne trouve pas dans le rock, ou presque pas. C’est au-delĂ . C’est Ă  la fois plus sombre et plus lumineux. Il y a quelque chose d’intemporel, de vif, de sensible et de troublant.

Une belle rencontre.

*Pourquoi « John et Salomé« , me direz-vous ? Parce que Les Nuls. Et je ne sais pas si l’idĂ©e de passer le sketch en version audio au dĂ©but du concert – un dialogue de faux film porno, pour ceux qui ne connaissent pas – sera reconduite Ă  chaque fois, mais c’est une idĂ©e des plus conviviales.

PS Toutes les photos sont de Lionel Fraix. Merci Ă  lui. Pour une raison tout Ă  fait indĂ©pendante de ma volontĂ© il n’y a que des photos de L’Effondras. C’est pas fait exprĂšs.

L’Effondras

Korto

John & Salomé

« Punk au chapeau » : une interview avec Olivier Lowlight (PART 1)

Olive.jpg

Impossible de ne pas l’avoir dĂ©jĂ  croisĂ© Ă  un concert punk, rock ou hardcore, oĂč sa silhouette dĂ©gingandĂ©e occupe souvent une place du premier rang. Sans compter qu’il trouve le moyen de jouer dans pas moins de quatre groupes et de s’occuper de Lowlightconditions, son site de photos de concerts. Ce type est-il humain ? Une chose est sĂ»re, en tous cas, Olive est un hardcore punk-rocker et un activiste de longue date de la scĂšne annecienne. Je lui ai donc envoyĂ© quelques questions. Vu son agenda de candidat en campagne poursuivi par la justice, ça a pris un petit bout de temps mais les rĂ©ponses sont finalement lĂ  et chaque ligne vaut dix fois les semaines d’attente. L’interview sera publiĂ©e en deux fois en raison de sa longueur. Enjoy !

Peux-tu nous présenter les groupes dans lesquels tu joues et nous parler un peu de leur actualité ?

C’est parti !

Je commence par le plus ancien : Fuck Da Tourist. Le groupe se dĂ©finit comme de l’anarko punk’n’roll, comme ça nous avons notre case pour ĂȘtre classifiĂ© et rangĂ© : paroles engagĂ©es et influences hardcore des 80’s / rock’n’roll. Le groupe s’est formĂ© en 2000. Mais il existait une « proto version » en 1995/96, sans nom, dans laquelle officiaient dĂ©jĂ  trois membres, le canal historique comme nous le dĂ©finissons, ha ha ha!

Je ne vais pas te faire la gĂ©nĂ©alogie parce que il faudrait bientĂŽt une page complĂšte mais pour l’instant nous sommes cinq : Laurent Ă  la batterie, Cyril Ă  la basse, CĂ©dric Ă  la guitare rythmique et moi Ă  la guitare lead (façon de parler). Et pour finir Manon au chant. Elle nous a rejoint rĂ©cemment et elle est la cinquiĂšme personne Ă  prendre le poste. Pour l’instant nous rĂ©pĂ©tons des anciens morceaux, des nouveaux arrivent petit Ă  petit. Nous avons dĂ©jĂ  fait quelques concerts et ça s’est trĂšs trĂšs bien passĂ©. Ce groupe a sorti deux albums et donnĂ© quelques morceaux pour diverses compilations Ă  buts militants. Un rythme trĂšs lent au niveau de la production, un album pour 2024 ?

Passons Ă  What The Fuck ?! C’est du garage dans le style Crypt Records ou In The Red Records, donc trĂšs basique, punk quoi ! On y trouve Jab (ancien Fuck Da tourist) Ă  la batterie et au chant, Pedro et moi aux guitares. Parfois je me colle au chant (hum hum…).Pas de basse.

Notre projet le plus immĂ©diat est d’enregistrer enfin un album (2017?) aprĂšs bientĂŽt 14 ans d’existence et un seul 45 tours split avec Jack Burton. Oui, encore un rythme trĂšs lent. Les changements de rythme de vie (enfants, travail…) expliqueraient en partie tout ça. Mais nous sommes toujours partants pour les concerts.

fdat

Ensuite vient Smutt, un groupe de Punk’n’roll efficace, aux textes engagĂ©s, parfois non. Formation Ă  cinq membres qui a dĂ©butĂ©e en 2012/13 : Oliv Ă  la batterie, Jim et Ben aux guitares, Mouss (ancien Fuck Da Tourist) au chant et pour finir moi Ă  la basse. Nous avons enregistrĂ© sept titres chez Big Balls Studio et ils devraient atterrir sur diffĂ©rents supports : un 45 tours disponible dĂšs maintenant pour la modique somme de 5 euros, un split 45 tours (reste Ă  trouver l’autre groupe…) et peut-ĂȘtre une compilation.

Comme les deux groupes prĂ©cĂ©dents (et celui qui suit), le but premier, tout du moins pour ma vision du truc, c’est de jouer partout oĂč c’est possible.

Et pour finir Thee Sweeders, le groupe le plus rĂ©cent, que j’ai rejoint en 2016. Je ne sais pas trop comment nous dĂ©finir, peut-ĂȘtre du garage 60’s, mais version annĂ©es 2000? Tout ce que je sais c’est qu’avec ce groupe, je me suis bien mis dans la galĂšre puisque je suis Ă  l’orgue Ă©lectrique… Et je ne sais pas du tout jouer du clavier. Je ne suis dĂ©jĂ  pas un grand bassiste ni un grand guitariste, mais alors le clavier… Donc j’apprends en rĂ©pĂšte, sur le tas, car je n’ai qu’un seul orgue. De toute façon, je ne joue dĂ©jĂ  pas de basse ou de guitare chez moi, ça ne change pas grand chose Ă  mon incompĂ©tence musicale.

Ce groupe est composé de Flo à la Batterie, Nox à la basse, Guibs à la guitare et au chant, et pour finir moi avec mon orgue électrique GEM Joker 61 de la fin des années 70.

Nous avons un set de 40 minutes avec deux reprise (Murder City Devils et Gun Club). Ca s’Ă©toffe petit Ă  petit. Nous avons fait quelques concerts qui se sont trĂšs bien passĂ©s. Les gens me posent mĂȘme des questions sur mon son d’orgue car ils le trouvent intĂ©ressant, comme quoi la technique on s’en branle…

Avec autant de diffĂ©rents projets, t’arrive-t-il de te mĂ©langer les pinceaux, de confondre les morceaux ?

Les groupes ne se ressemblent pas, mĂȘme si tous ont pour trait commun une approche punk, j’utilise divers instruments pour faire du bruit, et surtout je ne suis pas encore sĂ©nile donc ça va, je ne mĂ©lange pas tout.

flyer

Je crois que tu as environ 40 ans
 A ton avis, qu’est-ce que le punk-rock peut encore apporter aujourd’hui ? Et à toi, qu’est-ce qu’il t’apporte ?

Ca va faire 26 ans que j’ai 15 ans. Rien de grave.

Le punk-rock n’est qu’un genre musical, une des multiples Ă©volutions du rock’n’roll. Il n’amĂšnera aucun changement ou aucune rĂ©volution dans la sociĂ©tĂ© actuelle oĂč tout est digĂ©rĂ©, assimilĂ© et rendu obsolĂšte en un temps record. Dans les annĂ©es 70, ça a sĂ»rement Ă©tĂ© une petite rĂ©volution et les maisons de disques ont flairĂ© le truc en signant des groupes de punk-rock. Il ne faut pas croire que c’est l’industrie de la musique qui impose ses goĂ»ts aux consommateurs. L’industrie de la musique repĂšre ce qui plaĂźt, fait du marketing et le propose ensuite au consommateur lambda, souvent jusqu’Ă  l’overdose. Et le consommateur lambda aime se gaver de merde. Tu n’as qu’Ă  constater ce qui cartonne.

Je suis conscient que c’est bien plus complexe que ça et que ma vision est un peu caricaturale et simpliste, ce que tu retrouves souvent dans le dogme du punk-rock. C’Ă©tait dĂ©jĂ  dĂ©noncĂ© par Jello Biafra Ă  l’Ă©poque des Dead Kennedys avec le morceau Chickenshit Conformist oĂč il explique clairement que la scĂšne punk est centrĂ©e sur elle-mĂȘme et qu’elle ne changera jamais rien, que le punk rock mĂ©rite de mourir car il rĂ©pĂšte les schĂ©mas qu’il Ă©tait censĂ© combattre. Et relisez aussi les paroles de Nazi Punks Fuck Off, ça ne parle pas spĂ©cialement des nazis, mais d’un Ă©tat d’esprit proche du fascisme dans le punk-rock.

L’industrie musicale se plante parfois, mĂȘme souvent, personne ne sait comment faire un tube, et il existe de trĂšs bonnes choses sur les majors. Mais, encore une fois, j’ai l’impression que c’est la soupe qui gagne, que le consommateur lambda n’a pas envie de chercher, d’explorer, et cela malgrĂ© internet qui est un « endroit » formidable pour dĂ©couvrir et apprendre. Quand j’Ă©coute Built To Spill ou Radio Birdman au boulot, je ne suis pas trĂšs sĂ»r que ça plaise Ă  mes collĂšgues, mais tant pis. AprĂšs tout je dois subir Radio Nostalgie en contre coup. Donc pour le consommateur lambda, qui est majoritaire, le punk-rock n’amĂšne rien, c’est un genre musical Ă  aimer ou dĂ©tester, point barre.

L’une des premiĂšres fois oĂč le mot punk est employĂ© pour dĂ©finir une attitude et un genre musical, c’est dans les notes de pochettes des « Nuggets », sortie en 1972 par Leny Kaye, qui compile des groupes garages et psychĂ©s des annĂ©es 60. Ces chansons parlaient surtout des dĂ©sirs, des frustrations et des expĂ©riences d’adolescents, ce n’Ă©tait qu’une variation du rock’n’roll des annĂ©es 50. Nombre de groupes proto-punks (ce nĂ©ologisme n’est pas de moi!) ont Ă©tĂ© influencĂ©s par cette approche primitive, hĂ©doniste et parfois pessimiste, les Stooges Ă©tant pour moi le meilleur exemple.

smutt.jpg

Le MC5 est peut-ĂȘtre le premier groupe Ă  y mĂȘler une vision politique.

Donc je résume, le punk-rock, je le définirai comme étant :

1 – une catĂ©gorie, une case parmi d’autres pour l’industrie musicale, les rĂ©seaux sociaux (ou pas) et le consommateur lambda.

2 – une tentative d’appliquer le principe du D.I.Y. des Hippies. Et souvent une approche Ă©litiste et snobinarde, ce qui va Ă  l’encontre des principes d’ouverture d’esprit du punk, on n’en est pas Ă  une contradiction prĂšs…

Ma vision du punk correspond à ma deuxiÚme définition.

J’aime des groupes tels que les Ramones, The Clash, Nirvana ou The Strokes mais mon admiration va toujours vers des groupes tels que les Pagans : des groupes underground (ce qui parfois n’est pas forcĂ©ment la volontĂ© des groupes, ah ah ah !), sortant leur musique sur leurs propres labels parce qu’il n’y a rien d’autre, par exemple les groupes hardcore (au sens large) de la fin 70’s/dĂ©but 80’s. Les Dead Kennedys Ă©tant un de mes groupes cultes, si ce n’Ă©tait pas dĂ©jĂ  Ă©vident, ah ah ah !

Une chose intĂ©ressante c’est que le punk n’est pas forcĂ©ment rock. Tout peut-ĂȘtre mis Ă  la sauce punk : le blues, la musette, le ska… Donc le punk est un excellent moyen de dĂ©couvrir, d’ĂȘtre curieux. Le D.I.Y. c’est aussi la littĂ©rature, la peinture, le graphisme, le cinĂ©ma, la mode… C’est un Ă©tat d’esprit qui a poussĂ© un adolescent ayant un fort penchant pour le bizarre, l’Ă©trange, Ă  ĂȘtre curieux et Ă  plus se cultiver tout en restant un peu en marge, et en le vivant trĂšs bien. Je parle de moi. Je n’Ă©tais plus seul. D’autres personnes un peu bizarres se bougeaient et faisaient avancer leurs petits mondes Ă  elles tout en ayant rien Ă  battre de l’opinion des autres.

Cependant j’avoue que derniĂšrement j’ai perdu un peu de ma curiositĂ©, je suis un peu dĂ©connectĂ© et plus trĂšs au courant de ce qui se fait. Je continue Ă  acheter des disques, moins qu’avant. Moins de livres et moins de DVD. Les finances y sont pour quelque chose. Et j’ai surtout passĂ© une annĂ©e Ă  remonter ma vieille Vespa, donc j’ai lu de la revue technique et visitĂ© du site de piĂšces dĂ©tachĂ©es. Maintenant je rĂ©pare des amplis guitare, des platines vinyle, et j’achĂšte des pĂ©dales d’effets en kit, Ă  monter soi-mĂȘme, ce sont mes nouveaux passe-temps… Tout en Ă©coutant de la musique, Ă©videmment, mais moins de nouveautĂ©s, c’est certain.

285---Annecy--74-

J’imagine que tu connais plutît bien la scùne d’Annecy, qu’est-ce qu’il s’y passe en ce moment ?

J’ai commencĂ© Ă  trainer sur la scĂšne annĂ©cienne vers 1995. Je restais avec des potes Ă  glander dans Seynod, ville dortoir. On n’imaginait mĂȘme pas qu’il pouvait se dĂ©rouler des choses sur Annecy, donc j’ai manquĂ© ce qui s’est passĂ© au dĂ©but des annĂ©es 90.

Comme partout, des groupes se forment et d’autres splittent. En ce moment je n’entends pas parler d’un groupe qui envoie le pĂątĂ© et dans lequel il y aurait des jeunes Par jeunes, j’entends 15/25 ans. Bon aprĂšs, peut-ĂȘtre qu’il y a un effet gĂ©nĂ©rationnel dans le punk-rock aussi, les jeunes ne s’intĂ©ressent pas aux vieux, et rĂ©ciproquement. Et puis le punk n’est qu’une phase de la vie, non ? Donc il est normal que moins de monde vienne au concert des vieux groupes, ah ah ah! Ceci dit il y a Anarmada, du punk d-beat fait par des jeunes, mais plus trop jeunes non plus.

Des lieux ouvrent, d’autres ferment. Aujourd’hui il reste surtout des bars : le Bistro des Tilleuls (oĂč tu as aussi des soirĂ©es littĂ©raires), Le Chicago, La Brasserie Pirate. Des lieux plus alternatifs ont, ou vont cesser toute activitĂ© : La Machine Utile (encore que, on ne sait jamais si ce lieu est vraiment mort…), l’Alterlocal. Il y a un squat qui a ouvert rĂ©cemment Ă  Rumilly, et eux se bougent pas mal, les concerts ont lieu le dimanche aprĂšs-midi. Et ça draine du monde, surtout pour un dimanche. Mais ils commencent Ă  ĂȘtre emmerdĂ©(e)s.

Pour en revenir Ă  Annecy, j’ai l’impression que c’est un peu mort. Sauf pour les groupes cĂ©lĂšbres, qui n’ont pas trop de mal Ă  remplir le Brise Glace. Je me rĂ©pĂšte mais le punk rock n’est qu’un genre musical…

En mĂȘme temps ça n’a jamais Ă©tĂ© trĂšs vivant, on reste dans une petite ville, les passionnĂ©(e)s et les militant(e)s tournent en vase clos, comme depuis toujours. Il faut faire avec une politique culturelle catastrophique, J’ai le sentiment qu’Annecy se transforme de plus en plus en ville 5 Ă©toiles.

wtf2.jpg

What the fuck?! Ă  la Spirale en septembre 2016

Peux-tu nous dire une chose positive et une chose nĂ©gative Ă  propos de la scĂšne d’Annecy ?

Annecy Ă©tant une ville Ă  l’esprit petit bourgeois bien Ă©triquĂ©, tout du moins c’est l’impression qui en ressort, si tu t’intĂ©resses tu as vite fait de connaĂźtre tous les gens valables, et vite fait d’Ă©carter les poseurs, les m’as-tu-vu.

La scĂšne underground est petite et au niveau musical, c’est trĂšs incestueux. Les gens jouent dans pleins de groupes, ou projets comme on dit, ah ah ah ! Et tu as une sincĂ©ritĂ© et une humilitĂ©, c’est vraiment apprĂ©ciable, tu ne retrouves pas cet Ă©tat d’esprit de merde qui caractĂ©rise l’AnnĂ©cien(ne): pĂ©ter plus haut que son cul. Et puis ça bouge quand mĂȘme bien, malgrĂ© le manque de moyens. Tu peux toujours te faire prĂȘter une sono ou un ampli pour dĂ©panner. Mais comme partout en France, ça manque un peu de lieux pour jouer. Comme dit plus haut, il y a quelques bars, mais en gĂ©nĂ©ral « le sens de la fĂȘte » est limitĂ© par la prĂ©sence du voisinage. Si tu ne joues pas trop fort, tu as l’AmnĂ©sie ou Chez Dudu. Un autre problĂšme est le prix des loyers : si tu veux essayer de monter une structure indĂ©pendante pour ne pas dĂ©pendre de la politique culturelle locale, il faut bien tout calculer parce que le prix de la location ou de l’achat d’un local va ĂȘtre considĂ©rable.

Et pour finir, il manque un groupe de post-hardcore, un truc Ă  la Cult Of Luna. Si des gens motivĂ©s lisent ces lignes…

sweeders

Quelle est ta vision d’une scĂšne indĂ©pendante ? Penses-tu que les punks devraient complĂštement refuser tout ce qui touche au capitalisme ou Ă  l’état (codes-barres, circuits de distributions culturels classiques, promotions, subventions, etc.) ou es-tu plus « cool » ?

A partir du moment oĂč tu vends quelque chose, c’est du commerce, donc du capitalisme, ah ah ah ! Raccourci Ă  la con. Comme je l’ai dĂ©jĂ  longuement expliquĂ© plus haut, je me mĂ©fie des dogmatismes, il est trop facile de simplifier les choses et d’en faire une rĂšgle : ça c’est de la merde parce que c’est sur une major, ça c’est bien parce que c’est sur un label indĂ©… On ne peut pas nier la subjectivitĂ© et les goĂ»ts de chaque individu.

Donc chacun fait comme il le sent, personnellement mon but est l’Ă©change. Pour autant que je sache, aucun des morceaux des groupes dans lequels je joue n’est enregistrĂ© Ă  la SACEM, et aucun des disques n’arbore un code barre.

On a jouĂ© dans des squats, des salles subventionnĂ©es ou pour des associations. Pas d’apolitisme Ă©videmment, soyons clairs, mais pas d’extrĂ©misme non plus. Et je me fais souvent cette rĂ©flexon : jouer du punk et avoir un discours plolitisĂ© dans un squat, c’est facile. Quand c’est pour une fĂȘte de village, une kermesse ou un festival de MJC, c’est lĂ  que ça devient super dur. Tu rĂ©alises que 99% des gens s’en branlent de ton discours politisĂ©, ah ah ah ! Ils veulent juste danser et s’amuser, « pis la sono est pourrie, on comprend pas les paroles… »

Je sais que je suis trĂšs trĂšs mauvais commerçant, j’ai tendance Ă  donner les choses, les disques de mes groupes ou mes photos de concerts… Mais aprĂšs tout, c’est le but. Pourquoi garder tout un stock de disques dans une cave ? Je prĂ©fĂšre les donner et me dire que Ă©ventuellement la personne l’Ă©coutera une fois rentrĂ©e chez elle. C’est comme ça qu’il y a des disques de Fuck Da Tourist un peu partout dans le monde, hĂ© hĂ© hĂ©…

Pareil pour les photos, si le groupe veut utiliser une photo pour son site ou pour une pochette, pas de problĂšme. Je ne demande qu’un exemplaire du disque, c’est tout. Je ne mets jamais de copyright. Ce n’est pas moi sur la photo, c’est le groupe.

Par contre il existe une chose qui me rebute et dont je n’arrive vraiment pas Ă  comprendre l’utilitĂ©, c’est Facebook. A quoi ça sert rĂ©ellement ? Si tu revendiques un minimum de crĂ©ativitĂ©, si tu te prĂ©tends quand mĂȘme un peu artiste, tu te fabriques un site, ou tu demandes Ă  un(e) pote graphiste de le faire.

J’arrive bien Ă  faire une espĂšce de site de photos alors que je n’y connais rien.

Et puis Facebook n’a jamais drainĂ© plus de monde dans les concerts, enfin je n’espĂšre pas…

Fin de la 1re partie.

Fuck da tourist

Smutt

What the fuck?!

Thee Sweeders

Lowlightconditions

Punk ain’t no religious cult
Punk means thinking for yourself
You ain’t hardcore ’cause you spike your hair
When a jock still lives inside your head
Nazi punks
Nazi punks
Nazi punks, fuck off!
Nazi punks
Nazi punks
Nazi punks, fuck off!
If you’ve come to fight, get outta here
You ain’t no better than the bouncers
We ain’t trying to be police
When you ape the cops it ain’t anarchy
Nazi punks
Nazi punks
Nazi punks, fuck off!
Nazi punks
Nazi punks
Nazi punks, fuck off!
Ten guys jump one, what a man
You fight each other, the police state wins
Stab your backs when you trash our halls
Trash a bank if you’ve got real balls
You still think swastikas look cool
The real nazis run your schools
They’re coaches, businessmen and cops
In a real fourth reich you’ll be the first to goYou’ll be the first to go
You’ll be the first to go
You’ll be the first to go
Unless you think
Dead Kennedys, « Nazi punks fuck off »

OWUN, 2.5

cover.jpg

Faudrait ĂȘtre archĂ©ologue. Ou spĂ©lĂ©o, pour inspecter en profondeur et identifier les couches, les multiples strates qui constituent la musique des Grenoblois d’Owun. Il faut dire que la formation n’en est pas Ă  son coup d’essai. Le groupe existe depuis environ une vingtaine d’annĂ©es et 2.5, sorti sur le label Reafforests, grenoblois lui aussi, est son cinquiĂšme album.

Les neufs titres qui composent ce nouveau disque tissent tous les motifs mĂ©lodiques des synthĂ©s, parfois d’inspiration trĂšs new-wave/cold-wave, et quelque chose de plus Ă©pidermique, de plus rock. On pourrait s’amuser au jeu des rapprochements avec d’autres formations explorant ces territoires hybrides. Le groove aquatique de Foul pourrait rappeler Tortoise, Tom tombe a un air de parentĂ© avec la trance glaçée d’Electric electric et All of us, avec ses voix trafiquĂ©es semblant suivre leur propre cours sur une musique qui dĂ©file, fait un peu penser Ă  la noise cinĂ©matographique et rĂȘveuse de ZĂ«ro…

Mais, au final, Owun creuse un sillon qui lui est propre. Les synthĂ©s pratiquent un espĂšce de pointillisme, comme dans Tom tombe et ses sonoritĂ©s Steve Reichiennes, semblant chercher le point d’éblouissement oĂč les sens se troublent, oĂč la perception se modifie. KalĂ©idoscopes de motifs sans fin, gĂ©omĂ©tries Ă©tranges, symĂ©tries, points de fuite. La rĂ©pĂ©tition hypnotique – certains morceaux dĂ©passent les dix minutes – finit d’engourdir les sens. On se laisse passer de l’autre cĂŽtĂ©, prisonnier de cette bulle d’illusions cotonneuse et inconfortable.

Mais l’engourdissement est risquĂ©. Les longs passages martelĂ©s par des rythmes binaires dĂ©bouchent souvent sur des nappes de bruits stridents, des ocĂ©ans, et les rĂ©pĂ©titions aboutissent rĂ©guliĂšrement Ă  des dĂ©flagrations noise. Des embrasements oĂč toute nuance s’estompe, oĂč les rythmes disparaissent et oĂč tous les sons se fondent dans une distortion de fin du monde. Owun sait faire du bruit, beaucoup de bruit.

Bref, on ne peut pas trop reprocher Ă  Owun de suivre une mode ou de se cantonner Ă  un style facilement identifiable. Ces francs-tireurs contruisent une musique pensĂ©e et unique, Ă  la fois dansante et martiale. Et cet album cohĂ©rent et pas toujours facile d’accĂ©s est une excellente occasion de dĂ©couvrir ce groupe Ă  contre-courant.

Owun, 2.5 (Reafforests)

Owun bandcamp

Reafforests

Robotnicka, synth-punk d’avant le synth-punk

enter

Qui connait Robotnicka ? Ce groupe nĂ©, je crois, aux Tanneries de Dijon, dont ils ont fait trembler et danser les murs plus d’une fois et qui donne encore signe de vie par intermittence.

Rejeton ironique et dĂ©viant de la scĂšne punk/squatt/DIY, ce groupe a créé son propre univers, mĂ©lange de dĂ©lire disco-punk-paillette futuriste et d’inspiration politique radicale. Dans une sorte de concept-band qui n’est pas sans rappeler les Teddy boys radicaux de Nation of Ulysses. (Un groupe finalement assez obscur mais dont la crĂ©ativitĂ© dĂ©bridĂ©e en a inspirĂ© plus d’un dans les 90s. Refused, tu pourrais dire merci.)

robotnicka

Enfin bref, pour en revenir Ă  Robotnicka, ils prĂ©figuraient en quelque sorte la vague synth-punk qui fait rage actuellement. Bon, une rage relative, hein. Et ils ont quand mĂȘme fait deux tournĂ©es Ă©tats-uniennes – bon sang, ils ont jouĂ© avec 400 hundred years, Born dead icons, Capitalist casualties ou From ashes rise ! Et mĂȘme un tour au Japon tout rĂ©cent – 2016 – dont ils ont tirĂ© une K7 best-of.

Leur joli site donne un aperçu de leur univers rĂ©tro-futuriste et permet d’écouter la totalitĂ© de la discographie de ce groupe Ă  part.

a1668989315_10

Nono for an answer !

Soma skateboard medecine

Soma-46-cover.jpg

Photo Fabien Ponsero

Soma est un magazine de skate fabriquĂ© Ă  Grenoble. Comme tout mag de skate qui se respecte, il est bourrĂ© jusqu’Ă  la gueule de photos, particuliĂšrement esthĂ©tiques ici, notamment pour les couvertures qui jouent souvent avec des Ă©lĂ©ments architecturaux. Mais les articles – gĂ©nĂ©ralement des rĂ©cits de vagabondages de skaters en tournĂ©e – valent le coup aussi. Une espĂšce d’Ă©criture morveuse vraiment trĂšs marrante Ă  lire, qui sent les biĂšres cheap et un bon esprit de sale gosse monomaniaque n’ayant qu’une idĂ©e en tĂȘte : skater, skater et encore skater.

logo soma.jpg

La garantie d’un certain recul sur la vie donc, et sur la sociĂ©tĂ© en gĂ©nĂ©ral. Et un Ă©tat d’esprit assez proche de celui du fanzine. PlutĂŽt critique de l’Ă©volution toujours plus commerciale du skate avec une interview assez sceptique d’un « agent » de skater pro dans le dernier numĂ©ro et une lettre ouverte lasse et bien vue Ă  Christian Dior Ă  propos de l’utilisation du skate dans ses pubs. Et ce dernier numĂ©ro contient mĂȘme une interview de Marie Dabbadie, une skateuse transgenre qui fait un zine (papier !), XEM skaters, dĂ©diĂ© au skate queer.

En fait, le seul regret qu’on pourrait avoir, c’est qu’il n’y ait pas plus de pages dĂ©diĂ©es Ă  des sujets pas directement reliĂ©s au skate. Un peu Ă  l’exemple de Thrasher magazine oĂč certaines pages sont/Ă©taient consacrĂ©es Ă  des groupes de musique punk ou affiliĂ©s. Le skate a toujours Ă©tĂ© un rĂ©servoir de crĂ©ativitĂ© incroyable, aucun autre sport n’a une relation aussi forte Ă  la musique, Ă  la photo, Ă  l’esthĂ©tique. Sans parler des skaters peintres ou Ă©crivains. DĂ©fendre une idĂ©e du skate autre que strictement commerciale ou sportive, parler du skate dans ce qu’il a d’original et d’unique, c’est aussi parler de ça. Soma en rend compte, mais pourrait le faire encore plus.

Bref, Soma se trouve gratuitement Ă  ABS skateshop Ă  Annecy et c’est, vous l’aurez compris, une lecture de toilettes de grande classe. N’hĂ©sitez pas, c’est comme ça qu’ils le vendent.

Document numérisé.jpg

http://www.somaskate.com/

Tuco, EP

ep

RĂ©tropĂ©dalage de grande ampleur pour cette chronique d’un EP autoproduit sorti en… 2010. En mĂȘme temps, le groupe de Duillier (Suisse) a lui-mĂȘme pris un break de plusieurs annĂ©es entre-temps avant de revenir aux affaires et puis, aprĂšs tout, on s’en tartine, non ?

Quatre titres qui, de toute façon, mĂ©ritent amplement le coup de rĂ©troviseur. CoulĂ©s dans le mĂȘme plomb, la mĂȘme matiĂšre brĂ»lante sortie du studio de Serge Morratel. Batterie poid-lourd dĂ©passant rarement le mid-tempo, grondements de basse ferrailleuse et guitare abondant dans la distortion et la dissonance. Noise-hardcore dans le sillon d’Unsane, forcĂ©ment sanglant. MĂȘme si leur rĂ©fĂ©rence c’est plutĂŽt Keelhaul, d’oĂč ils tirent leur nom.

Mais n’allez pas croire que la musique de Tuco est monobloc ou que leurs morceaux soient interchangeables. Au contraire, sous des dehors bas du front, ça ruisselle de variations finaudes, d’idĂ©es poussĂ©es dans leurs retranchements et de rebondissements. Numb et son riff poussĂ© inexorablement en guise de longue intro, jusqu’au coup de turbo stoner speedĂ© gĂ©nial. Point. Line. Plane., Looters et leurs gros riff ventrus se mariant avec des arpĂšges grinçants, dans une conception toute neurasthĂ©nique de la mĂ©lodie, bien propre au noise-rock.

C’est d’ailleurs une constance chez Tuco, cet alliage de puissance et de passages atmosphĂ©riques. Mais attention : ici, le muscle reste bandĂ©. Pas de tentation post-hardcore blafarde, ni de chute dans le doom cafardeux. Et, dieu merci, Tuco n’est pas un groupe instrumental de plus. MĂȘme dans The Beef patrol, une voix finit par se frayer un chemin entre les rouages de la machine, une voix exaspĂ©rĂ©e, semblant lutter avec le manque d’air, qui donne Ă  la musique du groupe comme un air de parentĂ© avec Pord. Autres tailleurs de pierre avec les dents mais situĂ©s cĂŽtĂ© français, dans les CĂ©vennes.

Bref, en un mot comme en cent, Tuco frappait avec ce premier EP un putain de grand coup. Et c’est donc avec un plaisir non-feint qu’on voit le groupe reprendre du service et encore plus prĂ©parer un nouveau disque, prĂ©vu quelque part courant 2017.

 

4 4 is now illegal

Anartisanart

Capture d’écran_2017-03-13_10-48-42.jpgA la base plutĂŽt un service d’impression en sĂ©rigraphie, ce site distribue aussi pas mal de choses intĂ©ressantes, des disques de groupes locaux ou pas, des trucs essentiels comme des tee-shirts des BĂ©rus ou encore la biographie de Crass rĂ©cemment sortie.

Ce qui donne peut-ĂȘtre une idĂ©e de l’inspiration de cette initiative, basĂ©e dans la campagne chablaisienne (Marcellaz), un peu comme les fameux anarcho-punks du sud de l’Angleterre. Un Ă©tat d’esprit d’autonomie, d’auto-organisation et d’indĂ©pendance beaucoup trop rare dans notre coin de montagnes.

TĂŽle froide, Owun, Lynhood – La Reliure, 18 fĂ©v.

15068883_1014292715383490_5222512530434745808_o.jpg

C’est Ă  La Reliure, vieille baraque occupĂ©e par des ateliers artistiques Ă  la facade psychĂ©dĂ©lique tout Ă  fait incroyable, que se dĂ©roulait finalement ce concert.

TF 2.JPG

D’abord les lyonnaises de TĂŽle froide. Le trio propose une musique entre post-punk (un peu) rageur et pop acidulĂ©e. Des (petites) cousines de Massicot, en quelques sortes.

TF 1.JPG

Avec du chant en français, comme il sied bien à ce style à la fois revendicatif et naïf, leur set était frais et bien dynamique. Et elles avaient de jolies cassettes et patchs sur leur table de distribution.

owun 2.JPG

Owun sont Grenoblois et ce concert Ă©tait l’Ă©tape genevoise d’une tournĂ©e Ă  l’occasion de la sortie de leur album.

owun-3

Son massif, rythmiques rĂ©pĂ©titives, immuables, kalĂ©idoscope d’effets et de rĂ©verbĂ©rations. La musique du trio est Ă  la fois dansante et hypnotique, Ă©nergique et froide, martiale et aĂ©rienne.

owun-4

Un cocktail bien personnel, qui se mĂ»rit dans le temps et demande de l’attention. D’ailleurs de nombreuses personnes – enfin, proportionnellement Ă  la petite foule prĂ©sente, hein – se sont assises au fil du set. L’impression d’avoir fait un voyage, transportĂ© hors du temps… C’est donc que cette Ă©trange machine fonctionne.

Lynhood clĂŽturait cette soirĂ©e mais je n’ai fait qu’apercevoir ce projet solo qui semble tracer une ligne fragile et originale entre mĂ©lodies dĂ©licates et des Ă©lĂ©ments plus bruitistes. Elle aussi a sorti un disque sur le mĂȘme label grenoblois, Reafforests.

hate.JPG

Un soir sur terre avec Patti Smith

o_20170211_patti_smith_aude-haenni_02

« An intimate evening of words and songs with Patty Smith » disait le programme du festival Antigel. L’écriture et le chant, qu’est-ce qui peut mieux dĂ©finir l’art de la fameuse poĂ©tesse rock ?

Elle choisit quelques poĂšmes. Et, surtout, lira des extraits de Just kids, le rĂ©cit autobiographique candide de ses jeunes dĂ©buts Ă  New-York, de sa rencontre avec Robert Mapplethorpe et de sa mutation progressive en artiste. Pas de fioriture chez Patti Smith : l’écrit est lĂ  pour partager l’émotion du souvenir et rendre hommage. Robert Mapplethorpe, Jean Genet, Fred « Sonic » Smith (son mari, guitariste du MC5), William Blake, parmi les figures Ă©voquĂ©es et chĂ©ries. La petite histoire, celle d’une adolescente sans-le-sou dĂ©barquĂ©e dans les avenues de la Grosse pomme avec pour bagage son amour fou de la littĂ©rature, se mĂšle Ă  la grande, celle de l’art au XXe siĂšcle, celle que retiennent les livres.

o_20170211_patti-smith_melanie-groley_02

Sur scĂšne, elle est accompagnĂ©e par son fils, le guitariste Jackson Smith. Quand elle ne lit ou ne chante pas, Patti Smith plaisante avec le public et, au milieu de ses livres, de ses feuillets, de sa guitare et du micro, se trompe, se perd. Et son fils de jouer son rĂŽle de fils, prĂ©venant, enclenchant sa pĂ©dale lorsqu’elle a omis de le faire ou lui rappelant l’ordre des morceaux. Les deux jouant ainsi au public un petit numĂ©ro de comĂ©die familiale assez charmant.

o_20170211_patti-smith_melanie-groley_07

Mais lorsqu’elle chante, Patti Smith n’a plus rien d’une vieille dame perdue. La flamme de ses hymnes habitĂ©s, comme « Ghost dance », est toujours vivace, soutenue par la guitare avisĂ©e de Jackson Smith aux accents Americana. Sa voix, qui ressemble avec l’ñge de plus en plus Ă  celle de Lou Reed, mĂȘle inextricablement tendresse et colĂšre, au point que les deux soient indiscernables. D’ailleurs, qui peut dire si « Because the night » (dont elle racontera l’écriture – en fait un tube de Bruce Springsteen, qu’elle a d’abord dĂ©daignĂ© et dont les paroles lui sont venues dans un moment de dĂ©sƓuvrement et de frustration), qui peut dire si cette chanson est une chanson d’amour ou bien de dĂ©fiance et de dĂ©termination ?

o_20170211_patti-smith_melanie-groley_09

A plusieurs reprises, elle Ă©voque l’état du monde, la situation politique, fait lever les poings, appelle Ă  la dĂ©sobĂ©issance. Le fil rouge qui parcourt son Ɠuvre, c’est une haute idĂ©e de l’artiste, hĂ©ritĂ©e du romantisme et incarnĂ©e dans le rock, dans laquelle crĂ©ation, poĂ©sie et insoumission se mĂȘlent et sont insĂ©parables. Il y a peu, elle disait : « Aujourd’hui, il y a une nouvelle tendance qui est d’approcher l’art avec une vision entrepreneuriale [
] Pour moi, ce n’est pas de l’art, c’est autre chose : une forme d’expression liĂ©e Ă  la culture et aux rĂ©seaux sociaux. »* Au vu du prix du billet d’entrĂ©e, on est loin des idĂ©aux alternatifs du punk, mais Patti Smith porte encore et toujours cette vision intempestive, incandescente, de l’art.

Heureux d’avoir pu en ĂȘtre le tĂ©moin ce soir-lĂ .

o_20170211_patti-smith_melanie-groley_03

* Interview parue dans Les Inrockuptibles, n°1063.

SLOKS : the turbo-garage interview

16810857_389661454744739_473096345_o

You don’t need much : a gig in La Spirale in Annecy, as wild and intense as it gets, a few listenings on their bandcamp and then you realize you really like the sound that band makes. From then on, it was not difficult to get in touch with SLOKS guitar player Andrea « Buddy fuzz » and send him a bunch of questions to get to know a bit more about the Turbo-garage fury from Torino named SLOKS. Loads of thanks to Ivy Claudy (IC), Peter Chopsticks (PC) and Buddy Fuzz (BF) for answering my questions.

I found that if the line-up of SLOKS – guitar, voice, drums – was pretty basic each element has lots of personality. The singing especially is very peculiar. How did you guys meet and come to form SLOKS ?

IC : We met at an art exhibition in Torino. Andrea (the guitarist) was looking for a drummer and I (Ivy Claudy) play the drums, but Peter (the actual drummer) was faster than me ! Andrea gave me a tape of his songs that he was keeping in the pocket of his denim jacket and the following day I was in a church basement rehearsing with them.

Guessing from your strong performances on stage, I suppose SLOKS is not your first band, is that right ?

IC : I was the drummer of The Daisy Godzilla, Buddy used to play with the Wilma Strippers in the end of the 90s, Peter Chopsticks is still playing with Spareparts (funk/jazz/noise) and before Evilfish (stoner) and Contrite (postcore/noise).

The style of your drummer is pretty strong and physical, did he play in any hardcore or powerviolence band ? Or does he ? Or will he ?

BF : He likes hardcore music


16910887_389659924744892_248893689_o

The words and the way of singing bring about a really dark, tortured atmosphere
 Who writes the lyrics ? What are they about ?

IC : I’m in charge of the lyrics, so I’m the one to blame.

Apart from SLOKS, do you have any side musical or artistic project ?

IC : Peter plays with Spareparts (funk/jazz/noise) and he is also a graffiti artist.
Right after our last gig a bunch of underground local artists came up to me asking to join in their projects. Among them, I was flattered by the collaboration offers from Jena, the Maestro of “Jene nella notte” (a radio program on Radio Blackout) and from Alex aka “the Bad People” and his electro solo project.

How is the independent/musical/artistic scene in Torino ? What are the bands, musicians or artists that we should be aware of ?

IC : We often play in Torino thanks to friends and musicians that organize gigs for us
 There are many secret shows, a new fanzine Karaoke, great radio programs (Vita, morte e miracoli!), gigs and festivals
 We have just been invited at the end of April for a 2 days garage festival with friends Lame.

You just have a 7’’ out that, I believe, is your first actual physical record. Previous to that, you had released 7 songs on the internet (the oneUp 10’’), 4 of which are to be found on the new record. Can you tell us a bit more about these recordings and the relationship between them ?

IC : We have recorded 7 songs at Balsamic studio, during a weekend
 It has been fantastic ‘cause the sound engineer, Massimiliano Moccia, knew exactly what we wanted. The 7’’ was the quickest solution to fulfill our urge to release something.

16601575_374997709545772_3191479799032186173_o

Photo : Gabriella Di Muro

I really like the artwork of both your digital 10’’ and your 7’’, who made them ? Is the visual identity of your band important to you ?

IC : Buddy Fuzz did everything for the 7’’ and he is in charge of the artwork for flyers, stickers and the website (and he never asks for our opinion !)
For the 10’’ we used the art of Beppe Conti.

Are you total rock’n roll / garage-punk freaks ? If you had to choose three records to introduce a friend to that music, what would they be ?

BF-PC : I don’t know what kind of freaks we are, what I think is that SLOKS is like a cooking blender, you put good ingredients, mix them up and in the end you have muddy turbogarage. I think we are very influenced by what we listen to.
So the three records could be : “Soul Food” by Oblivians, “Los Angeles” by X, “At action park” by Shellac.

What did you think of your gigs at La Spirale (Annecy) and Le Brin d’Zinc (Barberaz) ? And what about the bands you played with in Annecy : Thee Sweeders and What the fuck?

IC : It was a great weekend, Slim Guib’s and his friends/bandmates were awesome
 We only have good memories and we decided to use one of the photos that Oliv (Thee Sweeders and What the fuck? member) took that evening for the back cover of our 7’’.

What can we expect from Sloks in the future ?

IC : We hope to come soon to France, my dream would be to play in August at the Freakshow Festival in Gigors.
BF : We just want to play more!16105689_365123763866500_1889596209515181348_n.png

All photos courtesy of SLOKS unless otherwise stated.