Cyclamen (Urgence disks – 28 octobre)

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De passage Ă  GenĂšve sur la fin d’une tournĂ©e europĂ©enne, le trio du Mans Cyclamen jouait Ă  Urgence disks, cette antre gĂ©niale oĂč passe Ă  peu prĂšs tout ce qui touche, gratte ou cogne sur des cordes ou des peaux.

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Difficile de pas penser Ă  Amanda Woodward en les Ă©coutant – et Ă  la façon dont ce groupe a marquĂ© le hardcore, en France et ailleurs – cet Ă©mo qui rocke, ces changements abrupts, cette façon de gueuler ou de parler et jusqu’Ă  certains effets, certaines Ă©vocations dub, sur la guitare.

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Le groupe apporte aussi sa dose de chaos et de folie personnelle. Et des idées originales, comme le banjo sur Les turpitudes, extrait de leur dernier EP.

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Phyllis Dietrichson est putain mort

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Phyllis Dietrichson est putain mort, il y a 3 ans ou quelque chose comme ça. FormĂ© sur les cendres de The June Ampera, du dĂ©sir de faire cette putain de musique qui te brĂ»le de l’intĂ©rieur. Un EP sorti en 2011 et un deuxiĂšme disque en split avec les amĂ©ricains de DĂ©rive en 2013. Un petit tour Ă  l’est, Ă  l’arrache, puis un projet de deuxiĂšme, avortĂ©.

Puis, plus rien.

Consumé.

Phyllis Dietrichson is about our hearts, our loneliness and the conviction that we have to fight again and again even if there’s no hope to win.
We are The Losers.

Depuis, un membre est parti et fait un groupe de bruit, un autre bidouille de l’électrique et boit des cafĂ©s et Ben officie dans Nurse, dont on devrait entendre parler dans un futur plus ou moins proche.

https://phyllisdietrichson.bandcamp.com/

« Usine intime » (Zerö, Mike Watt & Il Sogno del Marinaio – Usine, 12 octobre)

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L’Usine en mode cafĂ©-cabaret feutrĂ©, si, si, c’est possible. Peu d’affluence ce mercredi soir, malgrĂ© les grands noms Ă  l’affiche.

dscn2511Les lumiĂšres de ZĂ©rö Ă©taient intĂ©gralement rouges, sĂ»rement pour rappeler la pochette de leur dernier disque. De BĂ€stard, leur ancien groupe (dont ils joueront d’ailleurs un titre), je me rappelle une musique balladeuse, capable d’emprunter Ă  presque tout, de l’ambiant au noise, au cabaret, aux musiques traditionnelles…

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ZĂ©rö a aussi cette dimension touche-Ă -tout, cinĂ©matographique. Musique tendue, brumeuse. Parfois un peu insaisissable, Ă  l’image des visages Ă©vanouis de leur pochette encore une fois. Mais aussi traversĂ©e de montĂ©es de tension stridentes…

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AprÚs les ombres mouvantes de Zérö, le punk-rock expérimental et malicieux de Mike Watt, acoquiné avec le duo italien Il Sogno del Marionaio.

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Avec toujours ce style inimitable – quelque part entre rock minimaliste et progressif, si vous avez du mal Ă  imaginer, vous n’avez qu’Ă  Ă©couter –  et cette voix reconnaissable entre mille, Mike Watt continue de tracer son bonhomme de chemin. L’ex-Minutemen (pĂšres de tous les punks de traviole de la terre) et bassiste des Stooges* a toujours la patate pour venir jouer dans des endroits sombres et enfumĂ©s. L’Usine cette annĂ©e, Bellecombe-en-Bauges en 2014. A plus de 60 ans, avec son inamovible chemise Ă  carreaux, il est la preuve vivante que le punk-rock, ça peut ĂȘtre autre chose qu’une musique formatĂ©e. Il me fait penser Ă  un monde oĂč on oublierait pas qu’on a Ă©tĂ© un gosse, oĂč on oublierait pas qu’on peut ĂȘtre passionnĂ©, que ça peut ĂȘtre beau de crĂ©er, envers et contre tout.

Hey, c’est pas un peu la classe, ça ?

*AprĂšs Steve MacKay au Poulpe (avec Bunktilt), en 2014 ou quelque chose comme ça, c’est le 2e Stooges que je vois en concert dans le coin ! HĂ© hĂ© ! A quand Iggy pop Ă  Urgence disks?

Nevraska, sous haute tension

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Grave romance (Gabu asso, Urgence records, En veux-tu? En v’lĂ  !)

Les choses dans l’ordre. AprĂšs une premiĂšre dĂ©mo dĂ©jĂ  bien aguichante, le duo basse/batterie annecien Nevraska a poncĂ©, poli ses morceaux lors de tournĂ©es Ă  rĂ©pĂ©tition et sur le moindre bout de scĂšne locale qui lui est tombĂ©e sous la main. Jusqu’à les graver, tout beaux, tout chauds, sur les sillons d’un vinyle, produit par le groupe et une poignĂ©e de petits labels indĂ©pendants.

10 titres qui font bloc, trempĂ©s dans le mĂȘme bouillon d’un noise-rock Ă©motionnel et urgent. EnregistrĂ©s au Rec studio de Serge Morattel, garant d’un son ferrailleux et d’une ampleur titanesque. Riffs sous haute tension, qui tournoient et se chargent d’électrons jusqu’à l’implosion. Mathy noise-rock, comme disent les amĂ©ricains. Ou noisy math-rock. Dans les parages sombres et haletants de Doppler. Pour situer.

Mais Nevraska, c’est bien plus qu’une simple histoire d’étiquette ou d’influences. Comme il le dit lui-mĂȘme, le duo ne ferme la porte Ă  aucune source d’inspiration. L’ouverture de l’album, Dux Bellorum, rappelle que les deux musiciens officiaient plutĂŽt dans des combos post-hardcore. Malta s’autorise un groove presque fusion et le break d’Alkaline pourrait rappeler une ligne d’électro, avant qu’il ne s’enflamme dans un gros riff noise – quelle classe, ce genre de morceau, oĂč un groupe sait habilement fondre un riff typĂ© dans sa musique, qui fait son effet presque Ă  l’insu de l’auditeur. Le duo distille les ambiances, appuyĂ© par des samples assez prĂ©sents sans pour autant ĂȘtre envahissants, jouant parfois le rĂŽle du chant (magnifique Liru) ou osant des contrastes qui rappellent les expĂ©rimentations de Human side, le groupe prĂ©cĂ©dent de Pascal. Nemesis et ses choeurs. Les petites notes dĂ©solĂ©es de Tomoe Gozen, posĂ©es dĂ©licatement sur une succession de riffs survoltĂ©s… Une musique mature, qui ne joue dans aucune chapelle. Et c’est bien dommage, ça aurait de la gueule.

Impossible ici de regretter l’absence d’une quelconque six-cordes – mais qui oserait ? Les deux instruments mĂšnent un dialogue serrĂ©. Basse qui fait feu de tout bois, maniant autant le riff frontal et compact, le coup de butoir que les tensions mĂ©lodiques, lorsque ce ne sont pas les variations d’une batterie particuliĂšrement inspirĂ©e qui prennent le dessus. Le duo s’autorise Ă  peine Ă  ralentir le rythme sur Kollapse, qui, curieusement, est un des morceaux les plus marquants, sur l’album comme en concert. Trois petites notes tristounettes prenant peu Ă  peu de la vigueur, jusqu’à vibrer d’énergie et mĂȘme – mais oui, mais oui – de joie, puis disparaissant sur une descente de piano, fondu au noir de grande classe pour un morceau atypique et attachant.

EnveloppĂ©s dans une pochette au premier abord un peu froide, mais finalement cohĂ©rente avec l’esthĂ©tique sobre, toute en clair-obscurs, que le groupe s’est choisie, ce premier album est donc bourrĂ© jusqu’à la gueule de morceaux qui respirent l’expĂ©rience mais aussi la fraĂźcheur des premiĂšres fois. Pas mal pour un groupe qui avait commencĂ© comme une ultime tentative de deux « ex » un peu dĂ©sabusĂ©s. SacrĂ© coup, mĂȘme.

https://nevraska.bandcamp.com/

« Le futur dure longtemps » (Dinky Dwale, Catalgine, Les Cancres, Fisted by a priest – CafĂ© Chateau-rouge)

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OrganisĂ© par la fine Ă©quipe des studios de Chateau-rouge, cette soirĂ©e sur le thĂšme « No future? » rĂ©unissait une affiche bien variĂ©e…

Dinky Dwale a ouvert le bal… Duo folk-punk taillĂ© pour ce genre de scĂšne entre le concert et le cafĂ©, avec un chouette contraste entre la guitare accoustique, la voix fĂ©minine et les accents plus rugueux du second guitariste.

group-e-4Ce fĂ»t ensuite notre tour. On (Catalgine) a essayĂ© de proposer quelque chose d’assez personnel, en partie parce qu’on trouvait pas trĂšs punk de se limiter Ă  faire des reprises fidĂšles de « standards punks »…

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Au final, c’Ă©tait quand mĂȘme assez fidĂšle. A part la reprise libre de « Punk is dead » de Crass qui n’avait pas grand chose Ă  voir avec l’original.

DSCN2410.JPGC’Ă©tait un bon moment, en tous cas. On s’est demandĂ© si les gens connaissait encore Joy division, au vu des rĂ©actions…

Pris par les conversations d’aprĂšs concert, je n’ai pas rĂ©ellement Ă©coutĂ© le set des  Cancres. Une musique aux accents carrĂ©ment trad, avec un chanteur bien jetĂ©, Ă  ce qu’on m’a dit. Ils ont fait une reprise de « Bankrobber » des Clash. Une sacrĂ©ment bonne idĂ©e, ces reprises trad de morceaux punks. Je pense que le concept aurait pu ĂȘtre poussĂ© encore plus loin, d’ailleurs.

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Vu que, dans le punk, il faut Ă  peu prĂšs 20 ans d’activitĂ© pour se voir qualifier (ou s’auto-qualifier dans certains cas) de « lĂ©gende », cela fait de Fisted by a priest  une semi-lĂ©gende annemassienne.

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Fisted by a priest, pĂšre fouettard du punk-rock

Au vu du show explosif et joyeux du punk cover-band, ça parait pas usurpĂ©. Black flag, Ramones, Bad Brains, Turbo negro – les tubes punks s’enchainent. On boude pas son plaisir, constamment en train de se dire « Ah ouais attends, je la connais celle-là ». On lĂšve le poing, on beugle les choeurs et Trasho de Grilled flesh party aura  mĂȘme droit Ă  un slam jusqu’Ă  l’extĂ©rieur de Chateau-rouge.

DSCN2477.JPGLe groupe a clairement une prĂ©fĂ©rence pour les tout dĂ©buts du punk-hardcore – en fait, je connaissais mĂȘme pas le morceau antique de Bad Brains qu’ils ont jouĂ© (Regulator). Et surtout, Ă  Ă©couter leurs versions de « New rose » ou de « California ĂŒber alles », on se dit quand mĂȘme que ce sont des putains de bons morceaux.

Merci donc Ă  eux de faire vivre le patrimoine !

« Riot garage Ă  l’Ă©tage » (What the fuck?, Thee Sweeders, The Sloks – La Spirale, 17 septembre)

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On continue la dĂ©couverte des lieux alternatifs d’Annecy. Parfois, je me fais l’impression de faire le (fuck da) touriste de la scĂšne annecienne, mais bon, comme les gens sont sympas et qu’ils me parlent, ça va.

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SituĂ©e dans les replis d’un parking souterrain, La Spirale c’est une petite salle qui permet Ă  une poignĂ©e de groupes de rĂ©pĂ©ter et, Ă  l’occasion, d’organiser des concerts, moyennant Ăąpre nĂ©gociation avec les voisins.

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What the fuck? est un trio batterie et deux guitares, il y a pas de basse mais, eh, mec ! On s’en fout, on joue du garage ! On pourrait taper sur des bidons, en fait. Bref, aprĂšs quelques titres de chauffe, leur set s’Ă©lectrise et c’est parti. Donne-moi du riff  jurassique. Donne-moi du tatapoum Ă©pileptique.

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Le batteur-chanteur a une voix de redneck morveux, tandis que celle d’Olive Ă  la guitare est plus hargneuse. What the fuck? dĂ©fendent fiĂšrement les couleurs du wild garage rock’n roll, avec un son plutĂŽt puissant et granuleux.

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C’Ă©tait le premier concert de Thee Sweeders, un groupe oĂč on retrouvait Olive de What the fuck? (mais dans combien de groupes ce type joue-t-il ?), visiblement tout excitĂ© d’Ă©trenner ici son orgue sur scĂšne.

sweeders 2.JPGThee Sweeders oeuvre Ă©galement dans une veine rock’n roll, mais avec moins de gras sur la couenne que WTF ?, je dirais. Compos ciselĂ©es, chant aux mĂ©lodies tendues, rythmiques mĂ©tronimiques. Une science de l’Ă©criture classe… Ca donne envie d’en Ă©couter plus.

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The Sloks viennent de pas trĂšs loin, de Turin, et le trio propose une version encore plus squelettique de l’orchestre – batterie, guitare, voix. Mais c’est ce groupe minimaliste qui offre clairement la version la plus tarĂ©e du rock garage ce soir.

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Si les riffs sont typĂ©s, le groupe envoie tournoyer sa musique loin, loin, loin de la rengaine couplet-refrain-couplet -pont-refrain. Un peu de la mĂȘme maniĂšre que leurs compatriotes siciliens des Spritz, j’ai trouvĂ©, bien que ceux-ci aient mĂȘme pas de chant et que probablement ce soit assez diffĂ©rent. La chanteuse aux yeux exorbitĂ©s dĂ©bite de longues exhortations, oĂč l’on sent qu’il n’est pas question de sujets jolis-jolis. RĂąle. Viande saignante encore chaude. Nerfs en spasmes.

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Toute Ă  beugler ses histoires de souffrance, elle semble parfois se foutre royalement de ce que jouent ses compĂšres, et toute la musique du groupe fonctionne sur ce dĂ©calage hypnotisant. Oublie le rock. Oublie le garage. Oublie tes Ă©tiquettes. Je sais pas ce que c’est. Je sais pas si c’est de l’art. De la thĂ©rapie pour cas ruinĂ©s ou quoi que ce soit, la seule chose que je peux te dire, c’est que c’est vivant. Et que c’est bon.

Bref…  Y se passe des trucs bizarres dans les parkings souterrains d’Annecy la nuit, moi je vous l’ dis…

Devriez faire gaffe….

PS Merci Cédric pour le disque.

Lilith (Festival Dehors, 20 août)

DSCN2211.JPGLilith au festival Dehors, Ă  Portes-lĂšs-Valence… Un festival qui pratique une forme d’autogestion puisque les membres des compagnies assurent aussi l’accueil ou le service. Ca doit ĂȘtre fatigant mais assure aussi une ambiance trĂšs conviviale et des rencontres intĂ©ressantes pour le public.

Lilith, c’est un long poĂȘme de Joumana Haddad, dans lequel elle donne la parole Ă  ce mythe dĂ©viant de la premiĂšre femme, celle qui n’aurait pas voulu se soumettre et aurait prĂ©fĂ©rĂ© fuir le paradis plutĂŽt que d’obĂ©ir Ă  la loi patriarcale de Dieu et d’Adam.

Ici le poĂȘme est jouĂ©/incarnĂ© par une comĂ©dienne – GĂ©raldine Doat. L’expression « engagement total » m’est venu plusieurs fois Ă  l’esprit (les habituĂ©s des concerts punk pourraient y retrouver quelque chose). Son corps presque nu enduit de terre est agissant mais aussi Ă©lĂ©ment d’un dĂ©cor (accessoires minimalistes : un tas de terre, un arbre mort, quelques pots, un rideau transparent), d’une histoire aux dimensions myhiques. Dans le flux de cette longue performance entre danse et monologue dĂ©clamĂ©, ce corps est tour Ă  tour violent ou jouissant, menaçant ou fragile, sĂ©duisant ou horrible, et donne Ă  voir  les diffĂ©rentes dimensions du personnage. Grandiose et sauvage, ou plus philosophique, ou enfin presque banale, humaine.

Lilith, c’est un spectacle des FĂ©es rosses, une  compagnie grenobloise qui a l’ambition de porter – notamment par l’outil du théùtre de l’opprimĂ© mais pas seulement – des thĂ©matiques politiques, au-delĂ  des cercles fĂ©ministes ou libertaires.

 

Les Fées rosses

Festival Dehors

Maximum cuvette #3, #4, #5

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Ils sont forts Ă  Grenoble. Ils ont le Moucherotte, les nanotechnologies et mĂȘme un fanzine. Un vrai en papier, pas un bidule sur internet, photocopiĂ© avec de jolies couvertures sĂ©rigraphiĂ©es.

Ce zine collectif, au nom en forme de private joke (en rĂ©fĂ©rence Ă  un fanzine bien plus connu, que je ne ferai pas l’affront de citer mais je laisse quand mĂȘme trainer un petit lien on ne sait jamais) propose d’une part des interviews et des chroniques (musique, fanzines, livres) et d’autre part des textes plus personnels : rĂ©cits ou petits essais.

Certains textes ressortent du lot, comme le tour report de Chicken’s call en Asie, qui s’Ă©tale sur les #4 et 5. J’adore ce genre d’Ă©criture, Ă  la fois rĂ©cit du quotidien d’une tournĂ©e – jouer, manger, dormir, rouler -, de rencontres Ă©phĂ©mĂšres, d’anecdotes souvent drĂŽles mais parfois pas tant (la rencontre avec le groupe de hardcore facho) et d’obervations socio-politiques. Punk writing at its best !

Le #5 contient Ă©galement un texte excellent sur la sĂ©rigraphie. La dĂ©marche de l’auteure, qui pratique elle-mĂȘme la sĂ©rigraphie, est vraiment originale : elle  part de questions qu’elle se pose ou de problĂšmes qu’elle a rencontrĂ©s pour  aller Ă  la rencontre d’autres  personnes pratiquant la sĂ©rigraphie artisanale. Les discussions abordent des aspects techniques mais aussi des choix artistiques et soulĂšve des questions intĂ©ressantes sur le rapport Ă  l’imperfection, au dĂ©faut. J’ai trouvĂ© trĂšs pertinente le questionnement sur le rapport Ă  la maĂźtrise de techniques et les motivation de l’apprentissage. Cela fait carrĂ©ment Ă©cho Ă  des choses qu’on entend dans le punk, qu’on est pas obligĂ© de jouer de maniĂšre parfaite, acadĂ©mique, qu’un dĂ©faut peut produire un effet intĂ©ressant, ce genre de choses.

Certains rĂ©cits/fictions sont vraiment bien tournĂ©s et se lisent avec plaisir, comme le texte « Comme un oiseau », avec une bonne dose d’autodĂ©rision dans la mise-en-scĂšne de soi ou « Un simple problĂšme de soudure », sur le rapport Ă  la mort.

Les textes thĂ©oriques sont plus inĂ©gaux. Il y a une dĂ©fense intĂ©ressante du prix libre dans le #3, oĂč l’auteur aurait pu relever que la pratique du chapeau existait bien avant que les punks ne se l’approprient, et diffĂ©rentes reflexions sur le punk aussi. On remarque parfois dans ces textes que la volontĂ© de dĂ©passer les Ă©tiquettes, les prĂ©jugĂ©s, n’empĂȘche pas forcĂ©ment d’en faire usage dans d’autres contextes, mais bon, je crois que ça fait partie des contradictions du punk.

Les couvertures sĂ©rigraphiĂ©es sont super et la prĂ©sence des dessins apporte un bon contrepoint aux textes, mĂȘme si elle est assez discrĂšte. Bon, je sais pas si la chronique d’un fanzine punk est le lieu de considĂ©rations graphiques mais, Ă  mon avis, de ce point de vue, le #5 est le plus rĂ©ussi et peut-ĂȘtre que ce serait encore mieux en allant vers encore plus de dĂ©pouillement. La photo pourrait aussi ĂȘtre davantage prĂ©sente, apporter une respiration vis-Ă -vis des textes.

Pour rĂ©sumer, Maximum cuvette permet de se faire une petite idĂ©e des rĂ©flexions et des initiatives au sein de la scĂšne punk/DIY/autogĂ©rĂ©e grenobloise et au-delĂ . Sur les 5 numĂ©ros sortis, les trois derniers sont encore disponibles.  J’en ai pris quelques exemplaires en dĂ©pĂŽt, n’hĂ©sitez pas Ă  me contacter si vous ĂȘtes intĂ©ressĂ©s.

 

« Jour de Koller » (une conversation avec Lou Koller de Sick of it all)

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Comme son groupe, qui joue avec la mĂȘme ferveur devant des milliers de personnes ou pour quelques fans regroupĂ©s dans une salle, Lou Koller, chanteur-hurleur de Sick of it all, ne fait pas de diffĂ©rence entre les questions d’un petit fanzine ou celles d’une grosse tĂ©lĂ©. MĂȘme simplicitĂ©, mĂȘme franchise. MĂȘme entrain pour faire connaĂźtre et dĂ©fendre la musique et la scĂšne de New-York. L’occasion Ă©tait donc trop belle, lors leur passage Ă  Annecy pour la tournĂ©e anniversaire des 30 ans de SOIA, de causer un peu avec ce morceau d’histoire du New-York hardcore.

Cette interview est dédicacée à Wladi et à Megablast Limoges.

Quelle est votre relation au sport ? Les groupes de New-York hardcore sont connus pour ĂȘtre plutĂŽt costauds
.

Exact, tout le monde est trĂšs athlĂ©tique ! Mais je suis le plus fainĂ©ant de toute cette scĂšne ! Dans le groupe, mon frĂšre Pete, c’est du non-stop. En tournĂ©e ou hors-tournĂ©e, il s’entraĂźne sans arrĂȘt ! Greg s’entraĂźne aussi mais, quand on est sur la route, Pete est le seul Ă  faire des exercices tous les jours. Moi je dĂ©teste ça, c’est trop chiant ! Mais bon, j’ai la chance d’avoir toujours Ă©tĂ© mince. Le seul truc dont j’ai besoin, c’est l’endurance. A chaque fois, quelques semaines avant de partir en tournĂ©e, c’est du genre : Eh merde, on repart en tournĂ©e, faut que je fasse quelque chose ! Et je me mets Ă  courir et Ă  faire des exercices. Juste un peu, je devrais en faire plus mais j’ai un petite fille de 6 ans et ça me fait bien dĂ©jĂ  courir. Par beau temps, on est toujours dehors et mĂȘme en hiver on sort jouer dans la neige, dans la boue, peu importe !

D’oĂč est-ce que ça vient, cette prééminence du sport et de l’entraĂźnement, dans la scĂšne hardcore new-yorkaise ?

De la pĂ©riode des squatts, au tout dĂ©but. On squattait dans des quartiers maintenant trĂšs agrĂ©ables mais qui Ă©taient vraiment dangereux Ă  l’époque, avec pas mal de gangs de rues. Les gens d’Agnostic front et des Cro-mags vivaient dans des squatts et les gangs pouvaient arriver Ă  n’importe quel moment pour les chasser du lieu. Et puis, ils y vivaient, rĂ©paraient le batĂźment, bricolaient l’électricitĂ©, en plus de faire face aux gangs. Je pense que c’est une idĂ©e que les gens se sont faites Ă  partir des premiĂšres photos d’Agnostic front, des Cro-Mags ou mĂȘme de Murphy’s law, qui Ă©taient tous bien costauds. Tout le monde Ă©tait Ă  fond dans les arts martiaux…

Puisqu’on parle de la scĂšne new-yorkaise, j’ai toujors eu l’impression que le NYHC c’était pour une part ĂȘtre fier de l’endroit d’oĂč on venait, de sa communautĂ©. Est-ce que c’est vrai et, Ă  ton avis, d’oĂč ça vient ?

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Hmm…, je ne sais pas si c’est quelque chose de propre Ă  New-York. Avant il y avait la scĂšne de Boston qui avait sorti la compil « This is Boston not L.A. » et je crois qu’ils Ă©taient fiers de l’endroit d’oĂč ils venaient, eux aussi. Au tout dĂ©but, New-York Ă©tait coincĂ©e entre la grande scĂšne hardcore de DC et celle de Boston. Bien sĂ»r, on avait notre propre scĂšne mais au dĂ©but elle n’était pas trĂšs connue Ă  travers le pays. D’oĂč la fiertĂ© lorsqu’elle a acquis davantage de reconnaissance. Nous, on a eu de la chance, quand on est venu pour la premiĂšre fois en Europe en 1992, le travail de fondation avait Ă©tĂ© fait par des groupes comme Agnostic front ou les Gorilla biscuits, qui n’étaient pas trĂšs connus mais qui se dĂ©menaient pour faire un maximum de tournĂ©es. Et tout le monde se demandait « Cest quoi ce nouveau style, le New-York hardcore ? » On a vraiment eu de la chance, parce que quand on est venu, tout le monde Ă©tait intĂ©ressĂ© par le hardcore de New-York. Et donc, on s’en est rĂ©clamĂ© parce que c’est de lĂ  qu’on venait aussi. Parfois les gens disent « Vous ĂȘtes les rois du New-York hardcore » mais nous, on veut ĂȘtre les rois de rien du tout ! On voudrait ĂȘtre les ambassadeurs du New-York hardcore. On a ouvert pour des groupes de mĂ©tal, pour Slayer, pour Exodus, on a tournĂ© avec les Bosstones (Mighty-Mighty Bosstones, ska-punk NDLR) parce qu’on veut que le monde voit ce qu’on aime. Donc, je ne pense pas que ce soit propre Ă  New-York. C’est comme le foot : les gens sont fous de l’équipe de leur ville mais ils soutiennent aussi leur Ă©quipe nationale.

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A ton avis, est-ce que c’est liĂ© aussi Ă  l’origine sociale des gens investis dans la scĂšne hardcore ? Quelque chose de liĂ© Ă  des origines ouvriĂšres ?

Les origines des gens Ă©taient assez variĂ©es. Surtout une fois que la scĂšne est devenue assez connue, elle a attirĂ© pas mal de gamins. Moi par exemple, je viens de la banlieue, du Queens oĂč la scĂšne punk et hardcore Ă©tait Ă©norme. Les Ramones venaient de lĂ -bas et des groupes comme Murphy’s law et Leeway aussi. Une bonne partie des membres de Reagan youth venaient du Queens. Puis, on a tous migrĂ© vers Manhattan, oĂč se passaient vraiment les choses. MĂȘme lĂ , c’était « Sick of it all, les mecs du Queens » et puis c’est juste devenu le hardcore de New-York. C’est Ă©trange mais oui, je dirais que ça a Ă  voir avec la culture ouvriĂšre. Mais bon, il y en a qui venaient de familles aisĂ©es, comme les mecs de Youth of today, qui Ă©taient du Connecticut – Youth of today, un groupe emblĂ©matique du New-York hardcore !

Vous jouez dans beaucoup de gros festivals maintenant. Est-ce que vous jouez souvent dans des salles plus petites et qu’est-ce que tu prĂ©fĂšres ?

J’aime les deux ! J’aime vraiment le dĂ©fi de jouer dans de gros festivals, d’essayer de capter l’attention de 10 ou 20 000 personnes et de les ouvrir Ă  ton style de musique. Mais les clubs c’est parfait, tu sais que c’est 90 % de fans et que ça va ĂȘtre l’éclate. Sur une tournĂ©e comme celle-ci, on fait 3 petits concerts, puis le Hellfest, le Graspop et retour aux petits clubs.

Donc vous n’ĂȘtes pas frustrĂ©s de plus petites salles ?

Non, non, pas du tout. L’annĂ©e derniĂšre, on a jouĂ© au Secret spot (Je crois qu’il s’agit en fait du Secret place NDLR) Ă  Montpellier. La scĂšne Ă©tait minuscule et le concert incroyable. Des gens juste devant toi, qui te rentrent dedans. GĂ©nial.

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Ma prochaine question nous fait pas mal remonter dans le passĂ©. Je me rappelle que vous aviez fait un dĂ©bat Ă  la radio de l’universitĂ© de New-York* avec les gens de Born against, tu t’en rappelles ?

Ha ha ha, tu parles si je m’en rappelle !

…et j’ai lu que, mĂȘme si vous n’aviez pas la mĂȘme vision des choses, tu Ă©tais d’accord sur certains points. Je me demandais sur quoi exactement ?

Mais je l’avais dit mĂȘme Ă  ce moment-lĂ  ! Je comprenais ce qu’ils voulaient dire mais ils refusaient de comprendre notre point-de-vue ! Dans Sick of it all, Ă  l’époque, on bossait tous et certains d’entre nous travaillaient et allaient Ă  l’école en mĂȘme temps. Et ils nous disaient « Vous devriez fonder votre propre label ! » Putain, quand est-ce que j’aurais eu le temps ? Faut que je paye le loyer, que j’aille au boulot, j’ai pas le temps de faire un label ! Peut-ĂȘtre, avec le recul, qu’on aurait dĂ» crĂ©er notre propre label, peut-ĂȘtre qu’on aurait dĂ» tout faire nous-mĂȘmes, on aurait probablement gagnĂ© beaucoup plus d’argent ! Peut-ĂȘtre
 on sait pas ! Mais bon, on travaillait toute la semaine et le vendredi on empilait le matos dans le van, on conduisait 5 ou 10 heures : concert. Le samedi : concert. Le dimanche : concert. Retour Ă  la maison le dimanche soir. Lundi matin : retour du matĂ©riel, et direct au boulot. On a fait ça pendant des annĂ©es ! Alors, quand quelqu’un est venu et nous a proposĂ© de sortir nos disques, on a dit oui, bien sĂ»r. Mais je comprend ce qu’ils voulaient dire
 Tu sais, c’est marrant parce que, des annĂ©es aprĂšs, l’un d’entre eux, je ne me rappelle plus qui, a dit dans une interview « On avait nos convictions et ils avaient les leurs mais, hey, Sick of it all continuent Ă  jouer et ils tournent plutĂŽt pas mal donc je suppose qu’ils ont gagnĂ©. » Mais gagner, c’était pas le but ! C’était plutĂŽt de comprendre les points-de-vue de chacun !

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A propos de New-York, c’est une ville qui avait la rĂ©putation d’ĂȘtre trĂšs violente autrefois et qui est aujourd’hui prĂ©sentĂ©e comme une des plus sĂ»res des Etats-Unis, qu’en penses-tu ?

C’est vrai dans une certaine mesure. Il y a toujours du crime mais ça a bien diminuĂ©. Mais c’est Ă  double-tranchant : ils nettoient la ville mais elle perd beaucoup de sa personnalitĂ©. Une ville cool n’est pas obligĂ©e d’avoir des dealers Ă  chaque coin de rue, des agressions et des gangs, mais ce sont les grosses entreprises qui ont pris la place. Il y avait beaucoup de petits restaurants (« Mom and pop restaurants » NDLR) et maintenant c’est beaucoup de grosses chaines et moi, j’en ai rien Ă  foutre de ce genre de trucs. Je vais trĂšs rarement Ă  Manhattan aujourd’hui, je vis dans le New-Jersey. Je vais dans le Queens, Ă  Brooklyn, mon ancien quartier, c’est toujours comme avant. J’ai de bons amis qui ont vĂ©cu dans leur appartement Ă  Brooklyn pendant des dizaines d’annĂ©es et qui ont Ă©tĂ© obligĂ© de partir plus vers l’extĂ©rieur parce que le quartier s’embourgeoise (« is getting gentrified » NDLR). C’est ça le progrĂšs, je suppose (rires).

Si tu avais un ami qui venait Ă  New-York pour la premiĂšre fois, quels sont les endroits que tu lui conseillerais ?

Je pense que je conseillerais toujours Manhattan. MĂȘme si c’est bizarre parce qu’aujourdhui je connais des magasins de musique hors de New-York qui sont bien meilleurs que ceux de Manhattan. Vers le Bronx, il y a un endroit qui s’appelle Hastings-on-Hudson et il y a un magasin de disques, Clockwork records, tenu par un gars qui Ă©tait dans la scĂšne. Il Ă©tait toujours avec nous et son magasin est un des meilleurs de New-York ! Mais bon, il y a toujours la boutique New-York Hardcore Tattoos et encore quelques magasins de disque dans le centre mais en ce qui concerne les clubs, tu ne peux pas te tromper avec le Webster hall, l’ABC No Rio qui fait toujours des concerts hardcore en sous-sol
 Mais ils dĂ©mĂ©nagent bientĂŽt, le bĂątiment a Ă©tĂ© achetĂ©.

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As-tu un groupe français préféré ?

Un groupe français ? Oh
 Je les connais pas assez
 On en voit tellement
 (Il cherche, il cherche…) Ah, j’aime Black Zombie Procession ! On les a rencontrĂ©s l’autre soir, ils nous ont donnĂ© des CDs et c’était vraiment bien ! Super crossover !

Vous avez pas mal de morceaux aux influences punk-rock. Est-ce-que c’est une direction dans laquelle vous allez vous diriger de plus en plus ?

C’est quelque chose qu’on joue depuis des annĂ©es et des annĂ©es ! Depuis le tout dĂ©but mĂȘme, dans le premier album : Friends like you, Give respect Ă©taient influencĂ©es par le punk et la OĂŻ qu’on adore, tout comme le harcore et le mĂ©tal ! Les gens nous disent souvent : vous devriez Ă©crire plus de titres avec des choeurs comme Stepdown ou Die alone et d’autres veulent plus de trucs lourds comme Scratch the surface. On vient de faire un nouvel EP pour le 30e anniversaire, 5 morceaux, plus orientĂ©s lourd, mais avec des refrains OĂŻ. Donc ça reste toujours avec nous ! Les gens nous disent : regardez Hatebreed, c’est que du lourd et toute la salle devient dingue ! Mais nous, en concert, on a des supers rĂ©actions sur nos morceaux lourds et quand on fait nos singalongs, la salle explose ! Et ça, on pourra jamais s’en passer ! Mais je vois ce que tu veux dire… Pete Ă©coute de plus en plus de punk, je sais pas si c’est parce qu’il vieillit… C’est un peu flippant : parfois il joue des trucs, je lui demande ce que c’est et en fait c’est des nouveaux morceaux vraiment punk. Mais quand il arrive au studio, il a toujours plein de riffs lourds aussi. Moi, je prĂ©fĂšre les trucs lourds ! (rires)

Je pensais à Agnostic front, en fait, qui ont l’air d’aller de plus en plus dans cette direction


Le truc avec Agnostic front, c’est que « Victims in pain » est tellement un classique. Pour moi, c’est ça Agnostic front. « Cause for alarm » Ă©tait bien mais c’était un tel changement. Ils sont comme nous, des dizaines d’annĂ©es Ă  trouver le bon Ă©quilibre entre le lourd et les influences plus punk. « One voice » Ă©tait un super disque et puis ils ont quasiment virĂ© total street-punk et c’était classe. Et ils se sont remis Ă  faire des morceaux plus lourds et je trouve que ça fonctionne bien aussi. Nous aussi, on a eu des pĂ©riodes, plus punk-rock quand on Ă©tait sur Fat Wreck, puis plus lourd
 Mais bon, je crois qu’aujourd’hui, on est revenu Ă  ce qui nous convient le mieux !

 

* Ce dĂ©bat opposait entre autres des membres de Sick of it all Ă  ceux de Born against, qui prĂŽnaient une approche beaucoup plus politique et radicale de la musique, refusant de fontionner Ă  l’interieur du capitalisme. En France, Born against et la philosophie Do it yourself radicale inspireront notamment toute une scĂšne autour de Stonehenge records.

Les photos de cette interview sont l’oeuvre de Karine, merci ! Cette interview est une collaboration avec le chouette webzine Rictus.

 

« Les kids ont toujours la rage » (Happening, Sick of it all – Brise-Glace, 17 juin)

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Pour inaugurer la soirĂ©e, Happening avaient mis leurs plus beaux costumes de mangeurs d’enfants – Ă  moins que ce soit en rĂ©fĂ©rence aux jumeaux dans Alice au pays des merveilles, auxquels ils ressemblaient aussi. Je dirais bien que le trio revenait affutĂ© de leur sĂ©rie de concerts, notamment la tournĂ©e française avec les anglais de Kidbrother, mais en fait ils ont toujours Ă©tĂ© affutĂ©s, affutĂ©s comme des lames d’opinels sortant de l’usine.

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Les voir sur scĂšne permet de se rendre compte combien leur musique est ambitieuse, Ă  la fois technique, abrupte, et en mĂȘme temps trĂšs construite et sous forte influence mĂ©lodique. MĂȘme si Anthony, le chanteur, a toujours cette façon d’engueuler gentiment son public, les gens prĂ©sents leur ont bien fait la fĂȘte.

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On pouvait s’attendre Ă  ce qu’un groupe cĂ©lĂ©brant ses 30 annĂ©es d’existence et habituĂ©s des mĂ©ga-festivals ne fasse qu’une bouchĂ©e d’une salle modeste comme le Brise-Glace. Eh bien, c’est exactement ce qui s’est passĂ©.

K's Photography - Sick of it all (15)

Sick of it all attaque d’entrĂ©e de jeu avec trois titres ultra-rapides qui mettent le feu Ă  la salle, avant d’enchaĂźner sur des morceaux plus punk-rock, plus entrainants comme le tube « Stepdown », qui parsĂšment leur set.

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Sick of it all, c’est une rĂ©fĂ©rence incontournable du hardcore new-yorkais. Leur musique emprunte Ă  la fois au punk et au mĂ©tal sans jamais perdre son identitĂ© hardcore, son cĂŽtĂ© direct et percutant. Le groupe a toujours maintenu, Ă  ma connaissance, une attitude Ă  la fois rageuse, rĂ©flĂ©chie et accessible, perceptible dans leurs textes et dans leur prĂ©sence sur scĂšne.

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Pas de violence gratuite. La rage, mais aussi l’enthousiasme d’ĂȘtre lĂ  ensemble. En 2016 exactement comme en 1994, la premiĂšre fois que je les avais vus et oĂč ils avaient rĂ©pondu aux questions d’un fanzine obscur, montrant pour toujours aux kids Ă©bahis qu’on Ă©tait que le hardcore est une musique qui appartient Ă  ceux qui l’écoutent…

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Dans la fosse, c’est l’apocalypse. Pogo, slams et circle pits s’enchainent. Si quelques-uns croient encore que pogo rime avec violence, le bon esprit a pris rapidement le dessus. Les gens se soutiennent, se relĂšvent, font attention les uns aux autres – il y a quand mĂȘme dĂ» y avoir quelques articulations douloureuses le lendemain. Ca ne valait peut-ĂȘtre pas les fameuses « Sunday hardcore matinees » du CBGB Ă  New-York mais je crois qu’on peut quand mĂȘme dire qu’on s’est bien amusĂ©s !

Dans la salle bien remplie, les gĂ©nĂ©rations se croisent. Certains dĂ©couvrent le groupe, voire assistent Ă  leur premier concert de hardcore, et beaucoup d’autres, actifs dans la scĂšne aujourd’hui ou par le passĂ©, ont fait le dĂ©placement pour ce que reprĂ©sente le groupe. Sur un certain rĂ©seau social, j’ai vu passer le hashtag #annecyhardcorecity. On y croirait presque…

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Enfin pour que ce soit vraiment vrai, ce serait encore mieux que les concerts d’Underground family – le collectif qui fait qu’une scĂšne punk indĂ©pendante existe – fassent le plein. Et puis si la ville Ă©tait submergĂ©e par une nouvelle vague de groupes de hardcore, ça serait bien, aussi.

Hardcore… ou quelle que soit la forme que les kids utilisent pour crier leur rage et leur envie d’une vie diffĂ©rente aujourd’hui.

Toutes les photos de SOIA sont de K’s photography. Merci Karine !