Don Aman, « Tricératops »

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Don Aman, vu rĂ©cemment au Brind’Zinc prĂšs de ChambĂ©ry, a sorti ce premier album en 2015. En live comme sur disque, tout chez ce groupe semble pensĂ© et rĂ©alisĂ© avec soin. De l’objet et son joli artwork au son impeccable et aux compos recherchĂ©es.

La musique du trio navigue dans les eaux d’une pop-noise, dont les deux premiers morceaux « Favorite » et « Amore » sont deux exemples efficaces et convaincants. Des couches de distortions viennent parfois recouvrir le substrat trĂšs mĂ©lodique (Call it a hunch) et une ambiance gĂ©nĂ©rale plutĂŽt douce et intimiste, d’une maniĂšre qui me rappelle les vĂ©tĂ©rans noisy-pop amĂ©ricains de Yo la tengo. Sur « TricĂ©ratops », le ton monte et prend alors le visage d’un post-punk bruitiste qui fonctionne bien aussi.

La fin du disque tente une Ă©chappĂ©e vers les grands espaces, trĂšs slintiens pour Le Tigre (le groupe tire son nom d’un morceau de Slint) et plus surprenants sur le dernier morceau qui prend parfois des airs de rock seventies. MalgrĂ© ces ambitions, la relation est parfois Ă©trange entre la musique et la voix, beaucoup plus chantĂ©e que dans la moyenne des groupes, Ă  la fois mĂ©ditative et angoissĂ©e, fragile et trĂšs affirmĂ©e, trĂšs en avant. Face Ă  cette forte personnalitĂ©, la musique semble parfois encore un peu Ă©triquĂ©e, un peu binaire et laisse penser que ce groupe jeune peut encore amĂ©liorer son alchimie.

Don Aman

“Avant la musique” (Seabuckethorn, Shar, Housewives – Cave12, 11 dĂ©c.)

dscn2830Comme l’an passĂ©, le festival Face Z (L cette annĂ©e) posait ses valises Ă  Cave12 pour une soirĂ©e de dĂ©couverte musicale tout azimuth. Avec une arrivĂ©e tardive, sur les notes finales de Seabuckethorn, guitare jouĂ©e Ă  l’archet, salves mouvantes d’accords singuliĂšrement metalliques.

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Shar. Trio basse, batterie, ballons. Ca peut faire peur. Surtout quand la musicienne se met Ă  astiquer une longue quĂ©quette rose – un ballon – dĂšs le premier morceau. En fait, la trituration virtuose des ballons se rapproche de l’utilisation bruitiste de platines ou du son dĂ©chirĂ© d’un saxophone free-jazz. Les morceaux sont joueurs, limpides et ce free-rock malicieux, qui pourrait faire Ă©cho Ă  Fred Frith ou Ă  Roof, est finalement trĂšs accessible.

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Housewives ou l’obscuritĂ©. Sons stridents, amorphes, froideur, mĂ©lodies en bribes, parasitĂ©es, batterie squelettique. Le post-punk spectral de ces anglais affectionnant les pantalons feu de plancher ne ressemble Ă  aucun autre. Peuvent jamais rien faire comme tout le monde.

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Housewives

Seabuckethorn

Shar

#Upset the rythm

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Upset the rythm, c’est une Ă©mission sur Radio campus Grenoble et qu’on peut Ă©galement Ă©couter sur internet, dĂ©diĂ©e aux musiques qui ne tiennent pas en place, noise, math, Ă©lectro-chose, jazz-truc et j’en passe des plus contre-nature. Le programme est quand mĂȘme assez ambitieux puisqu’il s’agit de « combler le fossĂ© entre Steve Albini et Stravinsky ». Rien que ça.

Mais Upset the rythm se donne les moyens de ses ambitions. Avec une diffusion par mois, chaque Ă©mission est basĂ©e sur une recherche foulillĂ©e et une documentation mĂ©ticuleuse. Rien que les thĂšmes des Ă©missions passĂ©es mettent l’eau Ă  la bouche : « Ultraviolence », « L’arythmie ? », « Spoken word », « Japon », « Destructuration », « Intros, prĂ©ludes, interludes », etc., etc.

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Une approche quasi-savante, musicologique, qui promet d’ĂȘtre passionnante. Sans ĂȘtre prise de tĂȘte puisqu’elle est contrebalancĂ©e par un ton drĂŽle bien vu Ă  l’antenne. De la mĂȘme maniĂšre que la programmation peut faire suivre les musiques les plus pointues et contemporaines d’un bon vieux Big’N ou Shellac.

Bref, un petit bijou Ă  suivre ici pour ceux dont l’oreille est hardie !

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The Sloks, « oneUp »

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Ce trio originaire de Turin – la porte Ă  cotĂ©, quoi – a fait un passage remarquĂ© Ă  la Spirale Ă  Annecy en septembre. Leur dernier disque, intitulĂ© oneUp donc, est sorti uniquement en ligne. Peut-ĂȘtre faute de label. Les temps sont durs.

Mais The Sloks n’est pas du genre Ă  lĂącher l’affaire pour si peu. La passion tenace et le jusqu’au-boutisme transpire des 7 titres de ce qui pourrait ĂȘtre un 10’’. Tous taillĂ©s dans un rock’n roll garage tendu, toutes pĂ©dales de rĂ©verb et de fuzz dehors, et qui a quelque chose de minimaliste qui lui va comme un gant (une basse pointe le bout de son nez sur un des titres mais je ne suis pas sĂ»r qu’elle rajoute grand-chose).

Mais The Sloks ne seraient pas The Sloks sans la voix d’Ivy Claudy. Une voix qui joue un jeu trĂšs particulier. Souvent plaintive, geignarde, suintant le malaise et la colĂšre froide, elle prend Ă  contre-pied la musique pleine d’allant. RĂ©pĂ©titive et parfois monocorde, elle horripile, tend le nerf. Elle dĂ©bite des histoires qu’on devine d’adolescence rebelle, teigneuse (Thats not me), de vengeance dans Tank of Gasoline (l’essence, matiĂšre inflammable chĂšre au rock perturbĂ© – que ce monde pĂ©risse par oĂč il a pĂȘché ). Elle atteind des sommets dans Use me, transpirant le dĂ©fi, la dĂ©termination froide. On s’en est pris plein la gueule mais c’est pas pour ça qu’on va la fermer. Ni baisser le regard. Et jusqu’à exploser dans des rugissements, pris dans la tourmente d’une musique aux allures d’exorcisme.

Cette voix sĂ©vĂšrement perturbĂ©e imprime sa marque Ă  la musique du groupe. Elle contraste avec les ritournelles garages, comme si un teenage movie bien inoffensif virait au carnage psychopathe sur fonds de rock n’roll endiablĂ©. La fĂȘte est plus folle quand c’est une surprise. A certains moments, la guitare elle-mĂȘme semble s’imprĂ©gner de cette folie et ce sont mes passages prĂ©fĂ©rĂ©s. Elle se durcit pour dĂ©river vers quelque chose de dĂ©sarticulĂ©. Sur la fin de That’s not me, par exemple, ou dans Close the door, qu’on pourrait carrĂ©ment rapprocher du post-hardcore d’un Drive like Jehu.

Bref, oneUp est un grand disque de rock mauvais oĂč un groupe s’approprie une forme pour exprimer quelque chose de personnel. L’essence du punk, quoi.

Et ça s’Ă©coute ici.

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TBTWMUHF, « Sweet sleeping flow »

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Les Anneciens de The beauty the world makes us hope for, dĂ©jĂ  auteurs d’un LP, ont publiĂ© un nouveau titre sur leur bandcamp. 5″34 pour ce Sweet sleeping flow, par les temps qui courent ça fait presque format court et c’est rien Ă  cĂŽtĂ© des deux titres de leur album, tournant Ă  plus de 10 minutes.

Petits motifs fragiles se rĂ©pĂ©tant, d’abord timidement, puis s’affirmant avec de plus en plus de confiance, jusqu’Ă  Ă©clore dans de grands accords ouverts.

Le morceau est construit sur une longue montĂ©e (plus ou moins) dramatique, comme il se doit dans ce post-rock Ă  guitares et Ă  cymbales, mais qui n’ira jamais vers l’explosion, prĂ©fĂ©rant bifurquer, tomber brusquement Ă  genoux pour se remettre en marche ensuite.

Le groupe reste fidĂšle Ă  son parti-pris de douceur, baignant sa musique dans une rĂ©verbe cotonneuse, propice au rĂȘve Ă©veillĂ©, comme un moment de lumiĂšre rasante de fin de jour.

The beauty the world makes us hope for, une certaine idée du bonheur.

https://tbtwmuhf.bandcamp.com/

 

Barré #5

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Ce webzine étant consacré avant tout à la scÚne locale, on va prendre comme prétexte le fait que le magazine Barré est domicilié à Saint-Etienne (pas si loin) et que deux articles se rapportent à Grenoble (encore plus prÚs).

BarrĂ©, c’est donc un magazine – une revue plutĂŽt –  qui en est Ă  son 5e numĂ©ro et qui a l’ambition d’apporter une information et un point-de-vue diffĂ©rents. « Contre-culture, dĂ©viances et autres initiatives », dit la page de couverture. Et ce numĂ©ro tient plutĂŽt bien son programme. La contre-culture est bien reprĂ©sentĂ©e avec une rĂ©trospective sur le magazine freak (comprenez : hippie) quĂ©bĂ©cois Mainmise, les comics louches de « Crime does not pay » et l’Ă©crivain Claro. Il y a aussi une interview du dessinateur JM Bertoyas, qui, mĂȘme si on ne connait pas ses dessins, est trĂšs intĂ©ressante Ă  suivre. Des dessins bien barrĂ©s et une dĂ©marche qui n’a l’air vraiment pas conventionnelle, pour le coup. La dĂ©viance est surtout politique avec une interview de PiĂšces et Main d’oeuvre, collectif grenoblois critique (ha, le mot est faible) des nouvelles technologies, un dĂ©montage de la compensation Ă©cologique qui transforme la nature en monnaie d’Ă©change et un super reportage photographique sur Hong-Kong et la rĂ©volution des parapluies (j’avais jamais vu de photos, c’est trĂšs impressionnant de voir ces autoroutes bloquĂ©es par les campements des manifestants puis nettoyĂ©es de toute trace et rendues aux bagnoles et au commerce quelques jours aprĂšs). Sans oublier un petit voyage Ă  Cuba pour voir comment on vend la rĂ©volution aux touristes. Enfin, les initiatives ne sont pas en reste : un reportage sur un savon anti-paludisme, un super article sur les alliances citoyennes – des collectifs qui rĂ©unissent les habitants d’un quartier et des militants spĂ©cialistes de l’organisation politique dans des actions directes non-violentes autour de thĂ©matiques propres aux habitants. Et enfin, une rubrique « Fais-le toi-mĂȘme » explique comment fabriquer un mini-micro/capteur, le micro Piezzo.

Bon, y’a un article sur les origines du football espagnol, aussi. J’ai pas rĂ©ussi Ă  le mettre dans une des trois cases… DĂ©viances, je pense.

En fait, un peu comme ce qu’avait entrepris L’Oeil Ă©lectrique en son temps, BarrĂ© ressemble Ă  ce que pourraient produire des punks qui auraient grandi, voyagĂ©, fait des Ă©tudes et auraient assez d’argent pour s’acheter un appareil photo. D’ailleurs, en parlant de punk, c’est un de mes seuls regrets : Ă  part des suggestions pour une « anti-discothĂšque idĂ©ale » des annĂ©es 70, ce numĂ©ro ne comporte pas d’articles sur des groupes punks ou affiliĂ©s (Headwar dans le #2, punk texan dans le #1), qui auraient pu devenir la marque de fabrique du magazine.

Ce #5 a failli ne pas sortir, il s’en est fallu de peu, et surtout d’un financement participatif presque rĂ©ussi, pour que l’initiative prenne fin, et la contre-culture et les dĂ©viances avec. Ils ont un joli site web oĂč on peut s’abonner et commander tous les numĂ©ros, qu’on trouve aussi dans les bacs de quelques distros aux concerts.

http://barremag.info/

Nevraska, sous haute tension

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Grave romance (Gabu asso, Urgence records, En veux-tu? En v’lĂ  !)

Les choses dans l’ordre. AprĂšs une premiĂšre dĂ©mo dĂ©jĂ  bien aguichante, le duo basse/batterie annecien Nevraska a poncĂ©, poli ses morceaux lors de tournĂ©es Ă  rĂ©pĂ©tition et sur le moindre bout de scĂšne locale qui lui est tombĂ©e sous la main. Jusqu’à les graver, tout beaux, tout chauds, sur les sillons d’un vinyle, produit par le groupe et une poignĂ©e de petits labels indĂ©pendants.

10 titres qui font bloc, trempĂ©s dans le mĂȘme bouillon d’un noise-rock Ă©motionnel et urgent. EnregistrĂ©s au Rec studio de Serge Morattel, garant d’un son ferrailleux et d’une ampleur titanesque. Riffs sous haute tension, qui tournoient et se chargent d’électrons jusqu’à l’implosion. Mathy noise-rock, comme disent les amĂ©ricains. Ou noisy math-rock. Dans les parages sombres et haletants de Doppler. Pour situer.

Mais Nevraska, c’est bien plus qu’une simple histoire d’étiquette ou d’influences. Comme il le dit lui-mĂȘme, le duo ne ferme la porte Ă  aucune source d’inspiration. L’ouverture de l’album, Dux Bellorum, rappelle que les deux musiciens officiaient plutĂŽt dans des combos post-hardcore. Malta s’autorise un groove presque fusion et le break d’Alkaline pourrait rappeler une ligne d’électro, avant qu’il ne s’enflamme dans un gros riff noise – quelle classe, ce genre de morceau, oĂč un groupe sait habilement fondre un riff typĂ© dans sa musique, qui fait son effet presque Ă  l’insu de l’auditeur. Le duo distille les ambiances, appuyĂ© par des samples assez prĂ©sents sans pour autant ĂȘtre envahissants, jouant parfois le rĂŽle du chant (magnifique Liru) ou osant des contrastes qui rappellent les expĂ©rimentations de Human side, le groupe prĂ©cĂ©dent de Pascal. Nemesis et ses choeurs. Les petites notes dĂ©solĂ©es de Tomoe Gozen, posĂ©es dĂ©licatement sur une succession de riffs survoltĂ©s… Une musique mature, qui ne joue dans aucune chapelle. Et c’est bien dommage, ça aurait de la gueule.

Impossible ici de regretter l’absence d’une quelconque six-cordes – mais qui oserait ? Les deux instruments mĂšnent un dialogue serrĂ©. Basse qui fait feu de tout bois, maniant autant le riff frontal et compact, le coup de butoir que les tensions mĂ©lodiques, lorsque ce ne sont pas les variations d’une batterie particuliĂšrement inspirĂ©e qui prennent le dessus. Le duo s’autorise Ă  peine Ă  ralentir le rythme sur Kollapse, qui, curieusement, est un des morceaux les plus marquants, sur l’album comme en concert. Trois petites notes tristounettes prenant peu Ă  peu de la vigueur, jusqu’à vibrer d’énergie et mĂȘme – mais oui, mais oui – de joie, puis disparaissant sur une descente de piano, fondu au noir de grande classe pour un morceau atypique et attachant.

EnveloppĂ©s dans une pochette au premier abord un peu froide, mais finalement cohĂ©rente avec l’esthĂ©tique sobre, toute en clair-obscurs, que le groupe s’est choisie, ce premier album est donc bourrĂ© jusqu’à la gueule de morceaux qui respirent l’expĂ©rience mais aussi la fraĂźcheur des premiĂšres fois. Pas mal pour un groupe qui avait commencĂ© comme une ultime tentative de deux « ex » un peu dĂ©sabusĂ©s. SacrĂ© coup, mĂȘme.

https://nevraska.bandcamp.com/

Maximum cuvette #3, #4, #5

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Ils sont forts Ă  Grenoble. Ils ont le Moucherotte, les nanotechnologies et mĂȘme un fanzine. Un vrai en papier, pas un bidule sur internet, photocopiĂ© avec de jolies couvertures sĂ©rigraphiĂ©es.

Ce zine collectif, au nom en forme de private joke (en rĂ©fĂ©rence Ă  un fanzine bien plus connu, que je ne ferai pas l’affront de citer mais je laisse quand mĂȘme trainer un petit lien on ne sait jamais) propose d’une part des interviews et des chroniques (musique, fanzines, livres) et d’autre part des textes plus personnels : rĂ©cits ou petits essais.

Certains textes ressortent du lot, comme le tour report de Chicken’s call en Asie, qui s’Ă©tale sur les #4 et 5. J’adore ce genre d’Ă©criture, Ă  la fois rĂ©cit du quotidien d’une tournĂ©e – jouer, manger, dormir, rouler -, de rencontres Ă©phĂ©mĂšres, d’anecdotes souvent drĂŽles mais parfois pas tant (la rencontre avec le groupe de hardcore facho) et d’obervations socio-politiques. Punk writing at its best !

Le #5 contient Ă©galement un texte excellent sur la sĂ©rigraphie. La dĂ©marche de l’auteure, qui pratique elle-mĂȘme la sĂ©rigraphie, est vraiment originale : elle  part de questions qu’elle se pose ou de problĂšmes qu’elle a rencontrĂ©s pour  aller Ă  la rencontre d’autres  personnes pratiquant la sĂ©rigraphie artisanale. Les discussions abordent des aspects techniques mais aussi des choix artistiques et soulĂšve des questions intĂ©ressantes sur le rapport Ă  l’imperfection, au dĂ©faut. J’ai trouvĂ© trĂšs pertinente le questionnement sur le rapport Ă  la maĂźtrise de techniques et les motivation de l’apprentissage. Cela fait carrĂ©ment Ă©cho Ă  des choses qu’on entend dans le punk, qu’on est pas obligĂ© de jouer de maniĂšre parfaite, acadĂ©mique, qu’un dĂ©faut peut produire un effet intĂ©ressant, ce genre de choses.

Certains rĂ©cits/fictions sont vraiment bien tournĂ©s et se lisent avec plaisir, comme le texte « Comme un oiseau », avec une bonne dose d’autodĂ©rision dans la mise-en-scĂšne de soi ou « Un simple problĂšme de soudure », sur le rapport Ă  la mort.

Les textes thĂ©oriques sont plus inĂ©gaux. Il y a une dĂ©fense intĂ©ressante du prix libre dans le #3, oĂč l’auteur aurait pu relever que la pratique du chapeau existait bien avant que les punks ne se l’approprient, et diffĂ©rentes reflexions sur le punk aussi. On remarque parfois dans ces textes que la volontĂ© de dĂ©passer les Ă©tiquettes, les prĂ©jugĂ©s, n’empĂȘche pas forcĂ©ment d’en faire usage dans d’autres contextes, mais bon, je crois que ça fait partie des contradictions du punk.

Les couvertures sĂ©rigraphiĂ©es sont super et la prĂ©sence des dessins apporte un bon contrepoint aux textes, mĂȘme si elle est assez discrĂšte. Bon, je sais pas si la chronique d’un fanzine punk est le lieu de considĂ©rations graphiques mais, Ă  mon avis, de ce point de vue, le #5 est le plus rĂ©ussi et peut-ĂȘtre que ce serait encore mieux en allant vers encore plus de dĂ©pouillement. La photo pourrait aussi ĂȘtre davantage prĂ©sente, apporter une respiration vis-Ă -vis des textes.

Pour rĂ©sumer, Maximum cuvette permet de se faire une petite idĂ©e des rĂ©flexions et des initiatives au sein de la scĂšne punk/DIY/autogĂ©rĂ©e grenobloise et au-delĂ . Sur les 5 numĂ©ros sortis, les trois derniers sont encore disponibles.  J’en ai pris quelques exemplaires en dĂ©pĂŽt, n’hĂ©sitez pas Ă  me contacter si vous ĂȘtes intĂ©ressĂ©s.

 

« Chanson française cabossée » (Split Lovataraxx/Archet cassé !)

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Ce split est la premiĂšre production d’un nouveau label de Grenoble, Four4 recordz, et est disponible uniquement en cassette – ce qui fait que je ne le possĂšde pas physiquement, n’étant pas Ă©quipĂ© de ce matĂ©riel de pointe. Je suis tombĂ© dessus complĂštement par hasard, autrement je n’en aurais probablement jamais eu connaissance, comme la plupart des gens d’ailleurs.

Archet cassé !, c’est le projet solo de Josselin, le chanteur de Taulard. Difficile d’éviter les comparaisons avec ce groupe vu que l’air de famille est Ă©vident. MĂȘme rythmes binaires, mĂȘmes synthĂ©s qui donnent envie de siffloter, comme un air de game-boy. A y regarder de plus prĂšs, les nappes de synthĂ© sonnent quand mĂȘme un peu plus molles, plus cotonneuses, les sonoritĂ©s plus synthĂ©tiques. La musique a un peu moins d’allant et l’ambiance gĂ©nĂ©rale est plus intimiste, accentuant l’impression de solitude.

Le chant a un peu Ă©voluĂ© aussi et se permet quelques effets qui lui donnent davantage l’air d’un « chanteur » mais sans qu’il perde non plus ce cĂŽtĂ© slammeur paniquĂ©, ces lignes un peu bancales et ces rimes Ă  deux balles, qui faisaient tout le charme de l’album de Taulard. Il a ce truc gĂ©nial de faire sonner des phrases toutes bĂȘtes – « L’endroit oĂč j’ai grandi / Ă©tait si p’tit / j’pouvais mĂȘme pas choisir mes amis » – exactement comme, dans un style diffĂ©rent, certains groupes de rock français que j’aime presque malgrĂ© moi, les Wampas ou les ShĂ©riffs par exemple.

Mais ce qui est le plus captivant, c’est le contraste entre cette musique lĂ©gĂšre qui s’écoute et se retient en un clin d’oeil et le propos cru des textes. Anecdote glauque dans « Prof de français », douloureuse dans « Grincements ». On retrouve ce contraste dans pas mal de choses qui sortent en ce moment, sauf qu’ici c’est au-delĂ  du style. RĂ©cit sans fard du quotidien, auto-analyse dĂ©sarmante de sincĂ©ritĂ© des doutes et souffrances du personnage/chanteur au fil d’une annĂ©e qu’on suit Ă  travers des morceaux comme « la loose » ou « AnnĂ©e de merde ».

Le mĂ©tier de prof revient comme un fil conducteur dans les morceaux. L’hĂ©sitation face Ă  une voie tracĂ©e et la perspective de s’éloigner de la musique, de la crĂ©ation, jusqu’à cette fin hallucinante, « J’irai pas Ă  Versailles », oĂč la voix, citant la rĂ©ponse froide et bureaucratique de l’institution face Ă  la dĂ©mission, semble perdre tout Ă©lan et se crasher dans la torpeur dĂ©pressive.

Version sous anxiolytique de Taulard en quelque sorte, Archet cassé !, c’ est un bijou de chanson française-ragga minimaliste et cabossĂ©e.

La face Lovataraxx, elle, est assez Ă©trange. Une tonalitĂ© globalement new-wave sombre avec un son qu’on croirait tirĂ© tout droit d’un Joy Division, mais les morceaux sont assez hĂ©tĂ©rogĂšnes. « Ohrwurm » a des allures de titre de Yann Tiersen qui aurait trop tripĂ© sur la bande Ă  Ian Curtis (phrase clichĂ© de chroniqueur de disques n°523), « Hymnel » lorgne du cĂŽtĂ© de Cure mais avec des choeurs un peu surf et « RomĂ©o » propose un chant français narquois et rĂ©pĂ©titif. Cette face se termine sur « Idolon », un morceau qui pourrait ĂȘtre la bande-son d’un film d’horreur antique, quand on disait « film d’épouvante ». Bref, il y a tout un monde.

S’il-te-plait, clique là.

 

Split cassette Lovataraxx/Archet cassé !, Four4 recordz, mars 2016.

« Catalgine, tatapoum d’occaze »

Pochette 500 slippery goats

Ca nous a pris trois jours, trois jours de spaghettis Ă  la sauce tomate. Trois jours de temps incertain de fĂ©vrier 2016, dans le sous-sol d’une maison de La Machine, NiĂšvre.

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C’est une dĂ©mo – trois titres -, un essai, un tir dans le vide, un saut dans l’inconnu. On sait pas oĂč on va, ni vers quoi ça ira. La prochaine sera diffĂ©rente, sĂ»rement.

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On a fait un bandcamp et on proposera aussi une version CD avec les textes. Pour l’instant pas de concert, car le poste de bassiste a tendance à connaütre un turnover important.

Mais vivement l’ordre de bataille !

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enregistré au studio « Trace ta roots » (La Machine) par Julien du 19 au 21 février 2016
mixage et mastering : Julien
guitare/voix : tom
basse : chloé
batterie : pascal